Opération Epervier: nouvelles révélations dans l’affaire Nkoto Emane
Un rapport du Contrôle supérieur de l’Etat commandité par Ferdinand Ngoh Ngoh fait état d’irrégularités dans le marché de mise sur pied de l’annuaire officiel des abonnés au téléphone, attribué par Camtel au groupe Anypol en 2010. L’aval de Paul Biya attendu, avant l’arrestation de l’ex-Dg de Camtel.
Le mardi 16 avril dernier, l’ex-Directeur général de la Cameroon Telecommunications (Camtel), David Nkoto Emane, était une nouvelle fois devant les enquêteurs du Tribunal criminel spécial (Tcs), à Yaoundé. Il y est de nouveau attendu cette semaine et, contrairement aux rumeurs qui l’annonçaient en fuite vers la Guinée équatoriale, il est à son domicile de Bastos à Yaoundé. En plus du dossier Mobile Communication Network (MCN), le projet de développement de la 4G piloté par Boris Judicaël Nganou, le fils de l’actuel ministre des Travaux publics (Mintp), Emmanuel Nganou Djoumessi, dans lequel Nkoto Emane est entendu comme témoin, apprend-on de sources autorisées, l’ex-patron de Camtel est appelé à se justifier sur le marché de l’annuaire officiel des abonnés au téléphone. Ce marché d’environ 1 milliard Fcfa selon des sources proches du dossier, attribué au groupe Anypol en 2010, avait été livré en novembre 2013, soit près de quatre ans après. Il est donc reproché à Nkoto Emane d’avoir payé entièrement cette prestation sans avoir appliqué des sanctions vis-à-vis du prestataire, qui n’a pas respecté le délai contractuel de deux ans.
L’enquête du Contrôle supérieur de l’Etat (Consupe) qui aboutit à ces conclusions remonte à 2017, et a été commanditée par le secrétaire général de la présidence de la République (Sg/Pr), Ferdinand Ngoh Ngoh. Une première mission de la même institution avait séjourné à Camtel en 2015, laquelle avait relevé des irrégularités dans le cadre du paiement des honoraires des différents responsables ayant réalisé l’étude de faisabilité de la 4G au Cameroun. Les enquêteurs avaient alors conclu à des fautes de gestion ayant causé un préjudice financier qui se chiffrerait à plusieurs milliards Fcfa à Camtel. Le rapport publié en 2016 faisait état de dépenses non justifiées de l’ordre de 4 milliards Fcfa environ dans les comptes de Camtel. Dans le même document qui couvrait six exercices budgétaires (2010-2015), les enquêteurs avaient noté que le top management de l’opérateur public des télécommunications s’était octroyé des avantages indus d’un montant de 453 millions Fcfa, sans compter un certain nombre d’irrégularités constatées sur le paiement des frais de missions. Celles-ci auraient fait perdre jusqu’à 370 millions Fcfa à l’entreprise. Envoyé au palais et soumis à l’appréciation du président de la République, le dossier avait été jugé excessif et rejeté par Paul Biya.
Sans l’avis du chef de l’Etat, Ferdinand Ngoh Ngoh avait décidé d’envoyer une autre mission dans cette entreprise, laquelle est en grande partie à l’origine des auditions en cours de l’ex-Dg. Limogé de Camtel en décembre 2018, David Nkoto Emane, proche parmi les proches de l’ancien directeur du cabinet civil de la présidence, Martin Belinga Eboutou, aujourd’hui à la réserve de la République, serait-il victime de sa proximité avec cet ancien ponte ? La collaboration entre Belinga Eboutou et Ferdinand Ngoh Ngoh au palais de l’Unité entre le 09 décembre 2011 et le 03 mars 2018 aura été des plus sulfureuses. Aujourd’hui en position de force, le Sg/Pr qu’on présente comme le principal commanditaire de l’arrestation de l’ancien ministre de la Défense, Edgard Alain Mebe Ngo’o, serait déterminé à défaire le réseau Belinga. Seulement, après Mebe Ngo’o qui est un de ses proches parents, Paul Biya acceptera-t-il l’emprisonnement d’une autre de ses élites en moins de trois mois ? En effet, David Nkoto Emane est la première personnalité politique du Rdpc dans l’arrondissement de Meyomessala, auquel appartient Mvomeka’a, le village du chef de l’Etat.