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Loi de finances 2019 : pourquoi le budget de l’Etat a augmenté à 5212 milliards de FCFA

Le chef de l’Etat a signé, le 29 mai dernier, une ordonnance qui acte l'ajustement budgétaire du Cameroun en 2019 qui connaît une hausse 361,5 milliards de FCFA.

Paul Biya, le président de la République a signé le 29 mai 2019, une ordonnance modifiant et complétant certaines dispositions de la loi de finances 2019. À la lecture du texte présidentiel, on observe une hausse du budget de 361,5 milliards de FCFA, passant ainsi de 4850,5 milliards à 5212 milliards de FCFA. Les nouvelles poches de recettes sont reparties ainsi qu’il suit : 121,5 milliards de FCFA de recettes propres (dont 56 milliards de recettes pétrolières et 24, 5 milliards de recettes fiscales) et 240 milliards de FCFA d’emprunts (dont 188 milliards d’emprunts extérieurs).

La loi de finances ajustée confirme que le Cameroun s’endette pour rembourser sa dette. Sur une hausse des recettes de 361,5 milliards de FCFA, 240 milliards sont des emprunts. Et pourtant, 225,57 milliards de FCFA de ces recettes devraient être consacrés au service de la dette. Donc, l’argent supplémentaire emprunté va pratiquement ressortir pour payer la dette. Les projections de dépenses courantes baissent de 14,5 milliards de FCFA. On enregistre en effet beaucoup de coupes dans les budgets des ministères et autres institutions, mais des réallocations budgétaires aussi. Les principaux bénéficiaires sont : ministère des Travaux publics (47,58 milliards de FCFA en plus), ministère des Sports et de l’Éducation civique (44,06 milliards de FCFA en plus), ministère de l’Eau et de l’Énergie (23 milliards FCFA en plus).


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On note une coupe de 13 milliards dans le budget du ministère de la Défense. Mais, cela ne veut pas forcément dire que le budget consacré à la défense baisse. Car parallèlement, les prévisions de dépenses communes (ligne 65) sont en hausse de plus de 50 milliards de FCFA. On a souvent utilisé cette ligne budgétaire pour s’occuper des affaires de sécurité dans le pays.

Début mai déjà, « EcoMatin » annonçait déjà que le Cameroun va certainement procéder, dans les jours à venir, à une révision de la loi de finances 2019. Et pour cause, à l’issue de la 4è revue du programme économique (Facilité élargie de crédit pour la période 2017-2019) avec le Fonds monétaire international (FMI), Corinne Deléchat, le chef de la délégation qui a séjourné au Cameroun du 23 avril au 3 mai, a annoncé que les autorités camerounaises vont ajuster leur budget 2019 (4 850,5 milliards de FCFA). Ceci de manière à tenir compte de la hausse des recettes attendues et à incorporer pleinement les besoins de dépenses liés aux prochaines élections politiques et aux subventions des carburants, tout en maintenant le déficit global à 2 % du PIB.


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Selon Corinne Deléchat, «le budget révisé du Cameroun prévoit aussi l’accélération de la mise en œuvre des projets d’investissement financés sur ressources extérieures qui sont en cours sur la base d’un plan de décaissement dont les priorités sont bien établies. La hausse du financement extérieur permettra de reconstituer la marge de manœuvre budgétaire et de payer les arriérés sur dépenses qui se sont accumulés à la fin de 2018 ».

En date du 4 juin 2018, suite à la 3è revue du programme économique avec le FMI, Paul Biya, avait déjà signé une ordonnance modifiant et complétant la loi de finances 2018. Ainsi, les charges du budget général du Cameroun avaient augmenté de 4513,5 milliards à 4689,5 milliards FCFA. Ce qui représentait une hausse de 176 milliards de FCFA. L’exécution du budget en 2018, selon Corinne Deléchat, a été globalement conforme au programme économique avec le FMI.

Facteurs perturbateurs de la loi de finances 2019

En effet, dans une correspondance adressée au directeur général des Impôts, Modeste Mopa, le ministre des Finances, Louis Paul Motazé, ordonne la suspension des « mesures de redressement fiscal engagées » sur les compagnies d’assurance Vie. En clair, Louis Paul Motazé prescrit l’arrêt de toutes les mesures de rétorsion initiées par le fisc, contre les assureurs n’ayant pas respecté la nouvelle disposition de la loi de finances 2019, instituant la TVA (19,25 %) sur les produits d’assurance Vie.


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« Dans la mesure où une application inappropriée de la loi fiscale pourrait avoir des conséquences irréversibles induisant la question de la survie des sociétés d’assurance concernées, je vous invite à surseoir à l’exécution des mesures de redressement fiscal engagées sur ces entreprises, en attendant l’aboutissement de la concertation » avec les assureurs, écrit Louis Paul Motazé. En effet, apprend-on, les assureurs protestent vivement contre la disposition de la loi de finances susmentionnée, souligne le ministre des Finances. Au demeurant, ce n’est pas la première fois que les dispositions d’une loi de Finances sont réajustées par le ministère des Finances. En témoigne l’amnistie fiscale accordée en 2016 et 2017 aux contribuables assujettis au payement de la taxe foncière, alors que le paiement de cet impôt était prescrit dans la loi de finances.

l’incorporation de la taxe foncière dans les factures d’électricité devait permettre, dès la première année d’implémentation de la réforme, de doubler l’enveloppe de 5 milliards de FCFA actuellement collectée chaque année, au titre de cette taxe

Il y a également la taxe foncière dans les factures d’électricité. Initialement prévue pour être lancée en 2018, puis finalement reportée pour l’année 2019, l’incorporation par douzième de la taxe foncière dans les factures mensuelles d’électricité n’est plus à l’ordre du jour au Cameroun. Ce projet que le gouvernement s’apprêtait à implémenter avec le concours de l’électricien Eneo n’a finalement pas été entériné. Selon nos sources, le fisc camerounais s’appuiera simplement sur la base de données clients d’Eneo, pour distribuer des déclarations pré-remplies de cette taxe aux populations. À charge à ces derniers d’aller vers l’administration fiscale pour acquitter la taxe foncière.


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Cette distribution des déclarations pré-remplies, pourrait se faire via les sous-traitants de la compagnie d’électricité, généralement chargés du dispatching des factures. Dans ce cas, le fisc devra signer un contrat avec ces partenaires, à défaut d’envoyer lui-même des agents distributeurs sur le terrain. À en croire les projections officielles de la direction générale des impôts, l’incorporation de la taxe foncière dans les factures d’électricité devait permettre, dès la première année d’implémentation de la réforme, de doubler l’enveloppe de 5 milliards de FCFA actuellement collectée chaque année, au titre de cette taxe.

Sur le long terme, les responsables de la direction générale des impôts projetaient même de mobiliser jusqu’à 100 milliards de FCFA chaque année, une fois que cette réforme sur la collecte de la taxe foncière sera pleinement opérationnelle. En clair, en abandonnant ce mécanisme de recouvrement direct, le gouvernement camerounais sursoit à une enveloppe importante de recettes supplémentaires. Bien plus, l’État camerounais se prive de ressources qui auraient pu permettre de financer la décentralisation. La taxe foncière est effet une taxe locale. L’augmentation de cette recette aurait donc d’abord profité aux collectivités territoriales décentralisées.

Contentieux

Cette réforme en gestation depuis quelques années avait pourtant remporté l’adhésion du FMI, dans le cadre du programme économique et financier en cours avec le Cameroun. Cette institution de Bretton Woods y voyait non seulement une opportunité d’augmentation des recettes non pétrolières, mais aussi une occasion idoine pour garantir la transparence sur la propriété immobilière dans le pays.

« La refonte du recouvrement de la taxe foncière proposée par la direction générale des impôts doit être encouragée. […] Au-delà du potentiel considérable de recettes, la proposition présente aussi d’utiles opportunités en termes de réorganisation des services, qui devraient permettre, à terme, de mieux imposer les particuliers et les revenus de leurs biens fonciers. […] En outre, une démarche fondée sur le patrimoine et la comparaison des niveaux de vie qui en découle, est utile pour détecter les revenus dissimulés à l’étranger », souligne l’institution financière internationale dans un rapport daté de juillet 2017.


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Mais certains experts se sont opposés à cette mesure. Pour, l’inspecteur principal des impôts, Alain Symphorien Ndzana Biloa, elle porte les germes d’une tension sociale au regard du volume du contentieux que sa mise en œuvre pourrait générer. Et cela en raison du fait que 70 à 80 % des abonnés d’Eneo sont des locataires et donc ne sont pas redevables de la taxe foncière. Cet auteur prolixe dans le domaine a conseillé à l’administration fiscale d’exploiter les informations contenues dans le fichier d’Eneo pour localiser les contribuables assujettis à cette taxe.

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