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Business et Entreprises

Incitations : les entreprises peinent à réaliser les investissements projetés

Selon la direction générale des Impôts (DGI), seuls 11% des investissements projetés sont effectivement réalisés par les entreprises bénéficiaires des agréments.

La loi du 12 juillet 2017 modifiant et complétant certaines dispositions de celle du 18 avril 2013 fixant les incitations à l’investissement privé en République du Cameroun ne produit donc pas les effets escomptés. Selon une étude réalisée par la direction générale des Impôts (DGI), sur un échantillon de 80 entreprises donc 33 anciennes et 47 nouvelles, des investissements de 166,1 milliards de FCFA ont été effectivement réalisés, soit 11% des investissements projetés. 5 667 emplois ont été effectivement créés, représentant 26% des emplois projetés. Parmi les entreprises qui peinent à mettre en œuvre leurs investissements, le cas le plus emblématique est celui du projet de montage et d’assemblage de deux usines de véhicules lourds et légers à Douala et Kribi, dont le premier véhicule Made in Cameroon était annoncé avant la fin de l’année 2016. Mais presque trois ans après, ce projet n’a effectivement pas pris corps. Pourtant le promoteur de la Cameroon Automobile Industry Company (CAIC) rassurait lors de la signature de son agrément avec l’Agence de Promotion des Investissements (API), que tout était réuni pour que ce projet soit effectivement mis en œuvre. La CAIC avait même déjà signé la convention de mise à disposition d’un site avec la MAGZI.  La CAIC devait assembler et monter sur place au Cameroun des véhicules de marques MAN, DAF, Yutong et AZAD Coach. Dans l’ensemble, la DGI constate que le rythme de réalisation des investissements est plus rapide dans les anciennes entreprises que dans les nouvelles. Au bout de leur deuxième année d’investissement, les anciennes entreprises ont globalement réalisé 30% des investissements projetés. Cette tendance est la même en matière de création d’emplois.

Mais de façon globale, précise-t-on, le rythme général de réalisation des investissements objet des agréments est très lent, avec un démarrage généralement 2 ou 3 ans après l’obtention de l’agrément. Pour les investissements déjà réalisés, la dépense fiscale enregistrée par les services de la direction générale des Douanes est  de 94,895 milliards et 5,6 milliards de FCFA pour la direction générale des  Impôts, soit un total de 100,6 milliards de FCFA, représentant environ 24% des dépenses fiscales théoriques projetées, indique la DGI. La contribution de la loi dans la décision d’investissement a été jugée décisive, notamment dans les entreprises nouvelles, même si leur appréciation quant au contenu de la loi est mitigée, certains opérateurs souhaitant en effet que des incitations s’étendent aux matières premières. Ainsi plus de la moitié des opérateurs (60%) estime importantes ou très importantes les exonérations dans leur fond. La DGI note qu’en dépit de la dynamique des investissements et de l’emploi relevée dans certains secteurs de l’économie, notamment les cimenteries et l’agroalimentaire, les réalisations dans l’ensemble restent globalement en deçà des projections. Par contre, informe-t-on, la loi a contribué à un accroissement disproportionné des dépenses fiscales (plus de 100 milliards de FCFA) pour des investissements modestes. L’accroissement de la dépense fiscale est de 2,2 fois plus rapide celui des investissements réalisés (11% pour des investissements, contre 24,4% pour la dépense fiscale).

Pour concilier l’impératif de l’accélération des investissements et des créations d’emplois avec la minimisation des dépenses fiscales, indique la DGI, des réformes fiscales sont proposées en vue de modifier certaines dispositions de la loi et ses textes d’application. Notamment,  l’octroi des avantages de manière progressive en fonction du niveau de mise en œuvre du chronogramme des investissements, l’insertion des dispositions particulières favorisant le secteur primaire, pour une prise en compte effective des PME/PMI de production des produits du cru. Mais également, la révision de la durée des incitations accordées aux entreprises anciennes, en les ramenant de 5 à 3 ans, la réduction des mesures d’incitations fiscales, l’orientation des mesures d’incitations au profit des entreprises anciennes vers des véritables investissements nouveaux à grand impact, etc.

Des agréments de près de 3 500 milliards d’investissements déjà accordés

Les chiffres sont pourtant plus que flatteurs. La loi du 12 juillet 2017 modifiant et complétant certaines dispositions de celle du 18 avril 2013 fixant les incitations à l’investissement privé en République du Cameroun fait des émules. En quatre années seulement de mise en œuvre effective de cette loi, ce sont 157 conventions qui ont déjà été signées entre le gouvernement et le secteur privé, sous l’accompagnement de l’Agence de Promotion des Investissements (API). Ce,  pour un volume global d’investissements projetés de plus de 3 424 milliards de FCFA et plus de 55 000 emplois directs projetés. Mais depuis que l’API est placée sous la tutelle directe de la présidence de la République, ce sont 34 conventions d’investissement qui ont été signées pour des investissements projetés de plus de 1 173 milliards de FCFA. Pour la directrice générale de l’API, Marthe Angéline Minja, ce nouveau dispositif incitatif à l’investissement privé permet d’assurer un accompagnement rapproché des investisseurs à travers un système simplifié et allégé des procédures administratives.

Mais la direction générale de l’API avouait déjà être préoccupée par la mise en œuvre effective des projets dont les conventions ont été signées. Selon quelques chiffres évoqués par la DG de l’API, une trentaine d’entreprises bénéficiant des dispositions de la loi sur les incitations à l’investissement privé en République du Cameroun, ont effectivement démarré leurs activités sur le terrain. Bien qu’avouait-elle, cette évaluation n’était exhaustive. La DG de l’API donnait ces précisions lors des signatures des certaines conventions au siège de l’API à Yaoundé, le 28 juin 2018. Ce jour-là, quatre conventions d’investissement avaient été signées entre le gouvernement et le secteur privé, pour des investissements projetés de l’ordre de 50 milliards de FCFA. Parmi ces conventions, l’une portait sur le projet de construction d’une nouvelle cimenterie par la société Engineering Construction Manufacturing And Trading SARL, à Kribi pour un investissement de plus de 15 milliards de FCFA.

Pour les autres conventions, il y avait la société Tagidor Garden Hotel S.A, qui annonçait la construction de trois complexes touristiques à Bangou et Dschang dans la région de l’Ouest, mais également à Kribi dans la région du Sud. Le tout pour un investissement de 23 milliards de FCFA. Cet investissement devrait créer environ 1209 emplois directs, selon ses promoteurs. Pour sa part, la société Franco 2 et Compagnie, dont la présidente est Françoise Pouene, envisageait l’extension de son hôtel quatre étoiles à Yaoundé, pour un investissement de 6,3 milliards de FCFA, avec en prime 80 emplois directs à créer. Enfin, la société Comgry S.A allait investir 2,2 milliards de FCFA pour mettre en place une usine de transformation de la sciure et copeaux en biomasse à Douala, dans la région du Littoral.

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