Gouvernance forestière : l’Union Européenne et l’Allemagne rejettent le SIGIF 2
Les partenaires techniques et financiers du Cameroun dans ce projet de protection des espèces forestières et de contrôle de légalité du bois camerounais accusent le Ministère des forêts et de la faune d'avoir conduit de façon unilatérale sa mise en œuvre. Projet pourtant financé depuis 2015 par des fonds européens et allemands.
Une bonne nouvelle peut en cacher une mauvaise. Au moment où le Cameroun vient d’obtenir un financement de 7,2 milliards de FCFA du Fonds de l’environnement mondial (FEM), en vue de renforcer la gouvernance forestière communautaire à travers l’investissement privé, notamment dans les domaines du tourisme et du développement local, les relations entre l’Union Européenne et la Coopération Allemande se dégradent sérieusement en ce qui concerne la gouvernance forestière. Le Cameroun est en effet entré en délicatesse avec ces partenaires représentés respectivement par la KFW (banque Allemande) et la GIZ (Coopération Allemande).
Dans un communiqué conjoint, l’Union Européenne et la Coopération Allemande accusent le Cameroun d’avoir fait cavalier seul dans la mise en place du SIGIF 2, le Système Informatique de Gestion des Informations Forestières de 2ème génération, outil technique destiné à accompagner le Cameroun vers une meilleure gouvernance forestière, une plus grande transparence du secteur, à la lutte contre la corruption et l’illégalité. Ainsi qu’à œuvrer pour la durabilité et le renouvellement de la ressource forestière, la mobilisation des ressources financières domestiques à travers une fiscalité forestière incitative, la dématérialisation et la digitalisation. Financé depuis 2015 par l’Union Européenne et la Coopération Allemande, le SIGIF 2, d’après le communiqué conjoint, «aurait dû être une étape cruciale de la mise en œuvre de l’Accord de Partenariat Volontaire pour l’application des règlementations forestières, la gouvernance et les échanges commerciaux (APV FLEGT).
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Sauf que, d’après les deux entités européennes, le Ministère des Forêts et de Faune (MINFOF) camerounais «a retenu de manière unilatérale» une version du SIGIF 2, après s’être, avec les financements Européens et Allemands, attaché les services d’un prestataire pour la mise en œuvre de cet outil de gestion, pendant 14 mois. Ledit prestataire aurait d’ailleurs bénéficié d’une prolongation de contrat de 34 mois pour finaliser le logiciel, «en raison des validations compliquées de livrables intermédiaires par la Commission de réception», mentionne le communiqué conjoint. Toutefois, la version du SIGIF 2 sera finalement livrée au MINFOF en novembre 2018. Par contre, les partenaires techniques et financiers européens, regroupés au sein d’une Commission ad hoc, ont refusé de réceptionner le SIGIF 2, pour «non-conformité au cahier des charges». D’après le KFW et le GTZ, les tests réalisés par un consultant indépendant ont effet révélé des dysfonctionnements majeurs: «Son développement a fait l’objet de divergences importantes entre, d’une part, le MINFOF, et d’autre part, l’Union Européenne et l’Allemagne via le KFW. Ces derniers ont exprimé ouvertement leurs différends tout au long du processus de développement et d’évaluation du SIGIF 2, tout en offrant leur appui matériel, financier et technique pour faire disparaitre ces discordances», révèle le communiqué publié le 1er avril 2021.
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Pour avoir été écarté du processus de mise en œuvre du logiciel et de l’avancée du marché y relatif, KFW, en tant que partenaire financier, dit «ne plus être engagé vis-à-vis de cette activité». Par conséquent, l’Union Européenne et l’Allemagne décident de «de ne pas reconnaître la version actuelle du SIGIF 2 qui a été retenu de façon unilatérale par les services du MINFOF, et pourtant développée sur les financements Européens, qu’il conviendra donc de justifier devant les parlements Européens, indique clairement le KFW et le GIZ. Le SIGIF 2 est ainsi considéré par les partenaires techniques et financiers européens du Cameroun comme un simple outil national interne de gouvernance forestière (contrôle, traçabilité et légalité dans le commerce du bois camerounais). L’Union Européenne ne ferme néanmoins pas la porte à d’éventuelles renégociations pour la mise en place d’un autre instrument ou la refonte intégrale du SIGIF 2. A suivre.
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