Fiscalité : le Cameroun va taxer les actifs numériques à partir de 2024
L’État camerounais veut tirer profit de la montée en puissance des cryptomonnaies et cryptoactifs en instituant une fiscalité propre à ce type d’actifs. Mais encore faudra-t-il s’accorder sur la nature de ce qui est imposable dans un contexte où le régulateur du marché financier qui a institué cet actif semble encore imprécis.
Alors qu’il anticipe sur un repli sur un repli des recettes pétrolières en 2024 (-3,8%), le gouvernement camerounais a misé sur la fiscalité pour accroître ses ressources internes en 2024. De nouvelles niches fiscales ont ainsi été introduites dans le projet de loi de finances soumis le 30 novembre dernier à l’appréciation des députés. L’une d’elle est l’institution d’un régime fiscal pour les actifs numériques. Concrètement, les bénéfices réalisés sur le commerce autres actifs numériques ou crypto-actifs seront désormais taxés au même titre que les autres de capitaux mobiliers imposables à savoir les actions, les parts de capital, les revenus des obligations, les revenus des créances, les dépôts, cautionnement et comptes courants…
Si le projet de texte est approuvé par la représentation nationale, le Cameroun rejoint le cercle restreint de pays ayant un régime fiscal propre aux actifs numériques. Y figurent déjà des pays comme l’Inde, les USA ou encore la France. « Les modalités d’imposition des revenus tirés des actifs numériques sont précisées par un texte particulier du ministre chargé des finances » souligne le projet de texte.
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Ambiguïté
Il faut dire que l’intégration par le Cameroun de ces actifs dans la catégorie des capitaux mobiliers imposables intervient au moment où l’investissement sur cryptomonnaie a fortement pris de l’ampleur dans la CEMAC et au Cameroun en particulier. Selon le ministère des finances, le Cameroun compte près de 900 000 utilisateurs de cryptomonnaies, soit 6,76% de la population active. Ce qui place le Cameroun au 11e rang africain d’utilisateurs de cryptomonnaies, classement dominé par le Nigeria (22,33 millions d’utilisateurs). A l’échelle sous régionale, c’est le règlement N°01/22/CEMAC/UMAC/CM/COSUMAF portant organisation et fonctionnement du marché financier de l’Afrique Centrale, qui institue les termes actif numérique et jetons numériques. Deux mots synonymes à priori que le texte défini comme « tout bien incorporel représentant, sous forme numérique, un ou plusieurs droits pouvant être émis, inscrits, conservés ou transférés au moyen d’un dispositif d’enregistrement électronique partagé permettant d’identifier, directement ou indirectement le propriétaire dudit bien ».
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La Cosumaf ne parle pas de cryptomonnaies même si certains ont tôt fait de classer les cryptomonnaies dans la catégorie des actifs numériques. En France par exemple, le bitcoin(cryptomonnaie la plus célèbre) figure dans la catégorie des actifs numériques encadrés par l’AMF, le gendarme du marché financier.
La circulaire gouvernementale précisant les modalités d’imposition de ces actifs devra donc lever toute équivoque sur la nature des actifs imposables au risque d’ouvrir la voie à la prolifération d’activités illicites qui ont longtemps été décriés par les autorités. Mais il faudra pour cela une clarification en amont de la Cosumaf qui fait encore preuve d’imprécisions sur le champ d’application de cette réforme, tout de même complexe.
« Pour l’instant, on ne peut pas dire que les crypto-monnaies ont été clairement exclues ou admises par la Cosumaf. Il est donc impératif que le Règlement de la Cosumaf et les instructions à venir donne une clarification des termes», précise la présentation faite par Éric Pokem, sous-directeur des changes et des transferts à la direction de la coopération financière et monétaire (DCFM) du ministère des Finances (Minfi), dans une récente étude.
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