Financement de l’économie : ces 5400 milliards qui manquent au secteur privé
Avec 4642,88 milliards de FCFA de crédits octroyés par les banques en 2019, l’économie camerounaise n’a obtenu que 45,8% des fonds nécessaires pour impulser une croissance forte, créatrice d’emplois. Un tel sous financement plombe le développement et hypothèque l’émergence souhaitée.
Ne vous fiez pas aux apparences. A fin décembre 2019, le Cameroun compte 15 banques, 07 établissements financiers, près de 500 établissements de microfinance (EMF) et 25 sociétés d’assurances aux côtés desquels évoluent la Campost, 03 sociétés de téléphonie mobile opérant dans la finance digitale en partenariat avec des banques, ainsi que 16 projets étatiques à volet microfinance et de nombreuses associations à caractère financier.
A fin décembre 2019, le secteur bancaire camerounais a octroyé 4642,88 milliards de FCFA de crédits à l’économie. Ce montant était de 3161 milliards de FCFA en 2016 soit une augmentation de 1481,88 milliards (+39,92%) en quatre ans. Or, les principaux acteurs du système financier, notamment la Banque Centrale et les établissements de crédit, sont régulièrement interpellés sur la question du coût prohibitif du crédit et de son rationnement.
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C’est que, malgré la progression continue des crédits à l’économie, ces derniers restent relativement faibles en comparaison aux pays émergents ou développés, apprend-on dans «Les Contraintes au développement du crédit bancaire dans la Cemac », un article paru en juillet 2017 « Lettre de recherche » l’une des publications de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac). « En effet, le ratio des crédits bancaires au secteur privé non financier sur le PIB, qui traduit la profondeur financière, est en moyenne inférieur à 20% dans la Cemac alors qu’il dépasse 200% en Chine en 2016», affirment Jacques Landry Bikai, chef de service de l’analyse et de la modélisation des économies à la direction de la recherche et Moustapha Mbohou Mama, chef de service du suivi et analyse du système financier à la direction du crédit, des marchés des capitaux et du contrôle bancaire.
Croissance sans impact Selon Pierre Numkam, auditeur bancaire et président de la Mutuelle Inter-Africaine des Consommateurs des Biens et Services (Miacbis), une association de défense des droits des consommateurs des services financiers, la moyenne recommandée en Afrique sub-saharienne du ratio des crédits bancaires au secteur privé non financier sur le PIB est 45%. C’est le seuil de crédit nécessaire à l’économie pour impulser une croissance forte, durable et créatrice d’emplois.
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Au Cameroun, la masse de crédit à l’économie était de 20,61% du PIB en 2019 et seulement de 16,34% en 2016. En d’autres termes, l’économie camerounaise est en proie à un sous financement « chronique ». Avec un PIB de 22 522 milliards de FCFA en 2019 selon la Beac, le secteur privé local avait donc besoin de 5492 milliards de FCFA de plus l’année dernière en pour impulser une croissance forte et créatrice d’emplois nécessaires pour positionner le pays sur les rails de l’émergence.
Avec un PIB global de 54 624 milliards de FCFA pour la Cemac en 2019, selon les estimations de la Beac, il aurait donc que les banques de la sous-région accordent autour de 24 580,8 milliards de FCFA à l’ensemble des économies. Une telle masse de crédit permettrait alors de porter le PIB de la sous-région à près de 150 000 milliards de FCFA, selon Pierre Numkam.
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