Directeur général des impôts : L’urgence d’un choix
Alors que plus de 3 000 milliards de recettes sont attendues en 2023 par l’Etat et ses démembrements, l'absence d'un dirigeant à ce poste entraîne un retour des mauvaises pratiques au sein de l'administration fiscale.
Depuis le 25 janvier 2023, date à laquelle, le Haut Accord du Président de la République, Paul Biya, a été notifié pour la mise en disponibilité de Modeste MOPA comme Secrétaire exécutif TADAT, au FMI (structure donc la mission consiste dans l’évaluation des toutes les administrations fiscales du monde), la question se pose de savoir si la Direction Générale des Impôts, ce fleuron de l’administration publique camerounaise, dispose des ressources humaines capables de maintenir le cap ou pourquoi pas, de monter encore d’un cran dans la mobilisation des recettes fiscales et l’amélioration de la qualité de service offerte aux usagers.
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Les périls sont en effet nombreux, tant la cadence des réformes menées pendant près de dix ans par le manager sortant été forte et les résultats engrangés éloquents, en dépit des crises successives auxquelles le pays a été confronté.
Le premier et le plus grand des périls est celui de maintenir mobilisés et efficaces les près de 3 500 personnels de l’Administration fiscale dont certains peuvent, en l’absence d’une gouvernance claire, retourner aux mauvaises pratiques. Les premières remontées d’information des reporters d’EcoMatin envoyés sur le terrain semblent accréditer la thèse d’un retour progressif de comportements déviants dans les centres des impôts des PME et des moyennes entreprises. Il faut dire que la période y est propice : le début de l’exercice étant consacré par les entreprises au renouvellement de la documentation fiscale au paiement de la patente et des soldes d’impôts. Le monnayage des attestations d’immatriculation ou encore des attestations de non redevance reviennent au goût du jour. Les plateformes informatiques de la DGI sont de moins en moins accessibles pour les usagers, contraignant ces derniers à revenir dans les centres des impôts où de curieux intermédiaires et autres rabatteurs ont, contre espèces sonnantes et trébuchantes, solution à tout.
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Les conséquences de ces pratiques qu’on croyait à jamais révolues au sein de la DGI ne tarderont pas à se faire sentir sur les recettes fiscales ainsi que sur la nécessaire confiance des contribuables en l’administration fiscale.
Il s’agit pourtant pour la DGI de mobiliser en 2023 environ 2 800 milliards de fcfa (soit 65% des ressources internes de l’Etat) pour le financement du budget de l’Etat et environ 300 milliards de fcfa pour celui les Collectivités territoriales décentralisées et les organismes publiques (CRTV, Fonds National de l’Emploi, etc). Des cagnottes en augmentation de près de 15%, malgré le contexte de crises multiformes, par rapport à celles collectées en 2022.
Bien plus, les bailleurs de fonds et autres partenaires techniques de l’Etat (Fonds Monétaire International en tête, mais aussi Banque Mondiale, Banque Africaine de Développement, Union Européenne, Coopération allemande, etc.) attendent de la DGI la poursuite, voire l’accélération de ses réformes en vue de garantir une mobilisation encore plus accrue des recettes domestiques.
Les milieux d’affaires n’entendent pas baisser leur niveau d’exigence, en matière de qualité de service de l’administration fiscale, de baisse des taux nominaux des principaux impôts et d’élargissement de l’assiette pour une répartition plus équitable de la charge fiscale.
Il ressort de ce qui précède que ce n’est pas une boutade que de dire qu’il est urgent de remettre cette administration au travail au plus tôt. L’importance du turbo DGI dans le moteur des finances publiques camerounaises n’étant plus à démontrer, une baisse de régime prolongée dudit turbo produirait des effets en cascade sur le secteur public.
De façon plus prosaïque, il convient de rappeler que le paiement à bonne date des salaires des agents publics (plus de 125 milliards de fcfa de moyenne mensuelle), le remboursement régulier de la dette de l’Etat (environ 140 milliards de fcfa chaque mois) ainsi que le financement du fonctionnement courant des administrations dépendent, pour l’essentiel, de l’efficacité de la collecte des recettes par la DGI.
Tous les regards sont dès lors braqués sur le Palais d’Etoudi d’où est attendue la fumée blanche.