Consommation : incertitudes sur la livraison de pain à Bertoua
Dans le chef-lieu de la région de l'Est, les livreurs de pain menacent de suspendre les livraisons dans les artères de la ville. La cause? Ils ont vu leurs marges bénéficiaires se rétrécir considérablement du fait de la hausse du prix de la farine de blé.
Les livreurs indépendants de pain dans la ville de Bertoua, chef-lieu de la région de l’Est, sont en colère. Ces derniers reprochent aux boulangers, « l’augmentation unilatérale du prix du pain à la sortie d’usine ». Et un tour dans les boulangeries de la ville confirme d’ailleurs cette version. « Il est porté à la connaissance des livreurs que, dès le lundi 15 mars 2021, le pain leur sera désormais livré à 80 FCFA », peut-on lire à l’entrée des salles de machines d’une boulangerie dans la ville. Avec ce nouveau prix, les distributeurs indépendants estiment alors que « notre marge bénéficiaire est réduite d’un tiers. Avant cette augmentation, le pain à la sortie d’usine coûtait 70 FCFA. Nous avions 15 FCFA de bénéfice. Du jour au lendemain, et sans concertation, nous perdons 5 FCFA», explique un livreur en précisant que « c’est pour cette raison que nous avons observé un mouvement d’humeur le lundi 15 mars pour que la situation revienne à la normale ».
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De leur côté, les boulanger crient à la réduction des bénéfices. Et accusent les grossistes : « Nous ne nous en sortons plus depuis que les grossistes nous font subir cette hausse des prix. Et c’est après avoir étudié tous les contours de l’affaire que notre chef a proposé cette augmentation à ses collègues qui l’ont validée », souffle un cadre de la boulangerie Pain d’Or. Il reconnaît que « nous n’avons effectivement pas consulté les livreurs indépendants». Pour les propriétés des grands magasins, il y a eu effectivement l’augmentation du prix du sac de 50 kg de farine de blé. « Elle est la résultante d’une concertation entre le ministère du Commerce et les minotiers du Cameroun. Nous avons appris que, par deux fois, ils étaient allés rencontrer le ministre pour lui présenter la délicate situation qu’ils vivent depuis le déclenchement de la pandémie de Covid-19».
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Selon nos sources, les importateurs de blé croient qu’une des voies de sortie de crise, sinon la principale, est la retouche à la hausse du prix du sac de farine. « Alors que le Cameroun avait prévu l’importation de 900 000 tonnes de blé en 2020 (contre 830 000 tonnes en 2019), la Covid-19 est passée par là », explique-t-on au ministère du Commerce. La pénurie est justifiée par la suspension, jusqu’au 1er juillet 2020, des exportations par la Russie, principal fournisseur du Cameroun (40% des importations en 2017), question de « sécuriser son marché intérieur dans ce contexte de pandémie de coronavirus ».
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Sur le terrain, la disponibilité de pain dans la ville de Bertoua est hypothéquée du fait que des boutiquiers sont contraints d’aller eux-mêmes acheter le pain dans les boulangeries alors qu’ils ne gagnent pas grande chose. « Depuis lundi j’achète moi-même mon pain à la boulangerie puisque mon livreur ne vient plus. Je suis aussi découragé à vendre le pain et je crois que si la situation persiste, je vais arrêter de vendre le pain parce que je gagne seulement 10 frs sur une baguette de pain vendu, c’est insignifiant », s’indigne un boutiquier d’origine malienne au quartier Houssa. Au quartier Mokolo 2, Liliane qui vient d’ouvrir une petite boutique est du même avis. « Je ne vends plus le pain depuis lundi dernier parce que je ne peux pas payer le taxi pour aller prendre le pain à la boulangerie pour gagner seulement 10 frs », affirme-t-elle.
Martin Foula