Compte unique du trésor : l’Etat retire ses ressources des banques dès mars 2022
Le secteur bancaire gère actuellement près de 1000 milliards de FCFA de dépôts des entités publiques. Au-delà des aspects réglementaires, la centralisation de toutes les ressources publiques est un impératif pour une gestion efficace de la trésorerie. Des mécanismes de sauvegarde sont préconisés pour rassurer les différentes parties prenantes.
C’est la loi! L’article 79 de la loi du 11 juillet 2018 portant Régime financier de l’Etat et des autres entités publiques stipule que : “Les ressources publiques sont toutes quel qu’en soit la nature et l’attributaire, encaissées et gérées par des comptables publics. Elles sont versées et conservées dans un compte unique ouvert au nom du Trésor à la banque des Etats de l’Afrique centrale. Ce compte unique qui peut être divisé en sous-comptes, ne peut présenter un solde débiteur. Les dépenses publiques sont payées à partir de ce compte unique sur ordre des comptables publics. Aucun compte ne peut être ouvert par une administration publique dans une banque commerciale sans l’autorisation expresse du ministre chargé des finances dans les cas et dans les conditions déterminées par décret pris sur son rapport. Les fonds détenus par les comptables sont gérés selon le principe d’unité de caisse.”
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Après plus de trois années de sensibilisation, le gouvernement semble à bout de patience. En tout cas, l’on est formel au sein de la direction générale du Trésor, de la coopération financière et monétaire (Dgtcfm) du camerounais des Finances. “Le patron dit que le ministre a fixé la date limite à fin mars 2022 pour que toutes les entités publiques s’arriment au Compte unique du Trésor (CUT)”, murmure, sous anonymat, un collaborateur du Dgtcfm.
C’est qu’avec la crise économique des années 1990, l’Etat a connu quelques difficultés à faire face à ses engagements. Cette situation a entraîné la dégradation de la qualité de sa signature et la détérioration de la relation de confiance avec ses correspondants. L’une des conséquences directes de cet état de chose était la dispersion des fonds publics dans les comptes ouverts dans les livres des banques commerciales par les administrations et les correspondants du Trésor. Plus de 1000 comptes ouverts par les entités publiques dans le système bancaire en 2006. Mais l’adoption en 2007 d’un nouveau régime financier de l’Etat visait à (re)mettre de l’ordre dans ce secteur avec l’avènement d’un “Compte unique du Trésor (CUT)”.
Crise de confiance
Seulement, cette mesure qui découle du principe de l’universalité budgétaire ne semble pas du goût de tous les gestionnaires publics. Malgré les dispositions de la loi, plusieurs entités publiques continuent de conserver leurs ressources auprès des banques commerciales. Conséquence, regrette-t-on au ministère des Finances (Minfi), on note un volume important de dépôts publics encore domiciliés dans le système bancaire, de l’ordre de 958,867 milliards de FCFA au 31 décembre 2019 contre 1129,7 milliards de FCFA à fin décembre 2017. Ce qui révèle d’importantes résistances.
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En cause, la rigidité du système actuel où le CUT est géré par l’Agence centrale comptable du Trésor (Acct), seul interlocuteur de l’ensemble du réseau comptable de l’Etat vis-à-vis du système bancaire auquel il est interconnecté par le biais des plateformes Systac et Sygma. Cette situation a amené le ministère des Finances à engager une réforme du CUT pour faciliter l’adhésion de toutes les parties prenantes. Il semble donc que les travaux tirent à la fin. A l’avenir, explique-t-on à la Dgtcfm, on aura un compte ’’pivot’’ qui va centraliser toute la liquidité qui fera l’objet de recouvrement et chaque intervenant aura un relevé d’identité bancaire (RIB) qui lui permettra d’agir directement dans le compte de règlement soit pour encaisser soit pour décaisser.
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Par exemple, rassure-t-on à la Dgtcfm, “chaque maire aura un RIB qui lui permettra d’être identifié dans le système du CUT et d’effectuer ses ordres de virement sans plus passer par le Trésor.” Ce qui veut dire qu’avec la bascule effective dans le système du CUT, les maires n’auront plus de liens avec les divers comptables publics locaux que sont les trésoriers payeurs généraux et les receveurs des finances situés au niveau des départements. Pour le dire simplement, il s’agit simplement d’un déplacement de leurs comptes qui étaient tenus jusque-là au niveau des banques commerciales et le seront désormais à la banque centrale. Bien menée, cette mutation devrait permettre au gouvernement de gérer avec plus d’efficacité les tensions de trésoreries auxquelles il fait face depuis 2014.
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