Compte unique du trésor : comment les banques revendent à l’Etat son argent
Alors que les entités publiques cumulent des dépôts de 1000 milliards de FCFA dans les banques, l’Etat est obligé de s’endetter pour couvrir son besoin de trésorerie.
Difficile de dire si cette fois sera la bonne mais l’on jure au ministère des Finances (Minfi) que tout est fait pour susciter l’adhésion de toutes les parties prenantes à la mise en œuvre harmonieuse du Compte unique du Trésor (CUT). A cette fin, le Minfi, Louis Paul Motaze, a récemment conduit un atelier débat à Douala sur la réforme du CUT. Les travaux qui ont connu la participation d’environ 150 maires, du directeur général du Feicom, des représentants du secteur bancaire et du patronat ont abouti à l’adoption de la nouvelle architecture du CUT.
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L’atelier organisé du 4 au 5 novembre 2020 à Kribi pour renforcement des capacités des journalistes de la presse économique sur les réformes en cours au ministère des Finances a permis aux participants d’en savoir un peu plus sur ce processus. Ainsi, le chef service de la législation et de la codification à la direction générale du Trésor, Pierre Mba, explique qu’on aura désormais « un compte ’’pivot’’ qui va centraliser toute la liquidité qui fera l’objet de recouvrement et chaque intervenant aura un relevé d’identité bancaire (RIB) qui lui permettra d’agir directement dans le compte de règlement soit pour encaisser soit pour décaisser». La réforme en cours tranche avec le système actuel où le CUT est géré par l’Agence centrale comptable du Trésor (Acct), seul interlocuteur de l’ensemble du réseau comptable de l’Etat vis-à-vis du système bancaire auquel il est interconnecté par le biais des plateformes Systac et Sygma. Cependant, le champ d’intervention du CUT est encore partiel du fait de la non intégration des fonds d’autres entités publiques, notamment les Collectivités territoriales décentralisées (CTD), les établissements publics, les entreprises publiques, les programmes et projets, etc. Conséquence, regrette-t-on au Minfi, on note un volume important de dépôts publics encore domiciliés dans le système bancaire, de l’ordre de 958,867 milliards de FCFA au 31 décembre 2019 contre 1129,7 milliards de FCFA à fin décembre 2017. Or, la mobilisation desdits dépôts aurait permis de résorber la préoccupation relative aux impayés recensés en fin d’exercice (543,5 milliards à fin 2019 contre 415,03 milliards à fin 2018).
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Mécanismes de sauvegarde
Pour le cas spécifique des CTD, «chacun des maires aura un RIB qui lui permettra d’être identifié dans le système du CUT et d’effectuer ses ordres de virement sans plus passer par le Trésor », rassure le directeur de la comptabilité publique au Minfi, Achille Basahag. Ce qui veut dire qu’avec la bascule effective dans le système du CUT, les maires n’auront plus de liens avec les divers comptables publics locaux que sont les trésoriers payeurs généraux et les receveurs des finances situés au niveau des départements. Pour le dire simplement, « il s’agit simplement d’un déplacement de leurs comptes qui étaient tenus jusque-là au niveau des banques commerciales et le seront désormais à la banque centrale ».
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Bien menée, insiste Achille Basahag, cette mutation devrait permettre au gouvernement de gérer avec plus d’efficacité les tensions de trésoreries auxquelles il fait face depuis 2014. C’est pourquoi la rencontre de Douala a suggéré qu’une plateforme qui regroupant tous les acteurs soit rapidement mise en place. Au sein de cette plateforme, on aura la Banque centrale, les maires, le ministère des Finances, le patronat, etc. Ensuite, il y a des sécurités qui vont être mises en place à travers les RIB qui permettent à chaque entité d’agir directement sur le CUT sans passer par le Trésor. Enfin, il y a un mécanisme de nivellement automatique ou de plafonnement automatique intégré dans la convention qui va être signée entre le Cameroun et la Beac pour qu’il y ait des montants planchés qui figurent dans chaque compte.