Crise sécuritaire : malgré les tensions, l’État veut attirer les investisseurs dans les régions sinistrées
En déclarant les régions anglophones et celle de l’extrême Nord comme « zones économiques sinistrées », le gouvernement camerounais à travers un décret du Premier ministre propose des exonérations fiscales aux entrepreneurs voulant développer des affaires dans ces localités.
Les régions camerounaises du Nord-Ouest, du Sud-Ouest (NO/SO), et de l’Extrême-Nord ont été déclarées lundi 02 septembre 2019 « zones économiquement sinistrées », selon un décret signé par le Premier ministre Joseph Dion Ngute. Ce texte vise à créer des mesures favorables pour l’installation d’entreprises dans ces zones touchées par l’insécurité. Celles qui s’y installeront bénéficieront d’exonération de taxes et d’impôts pendant une période de trois ans. Les dispositions du gouvernement sur les « zones économiques sinistrées » se rajoutent ainsi à la loi portant incitations à l’investissement privé en République du Cameroun. Ce texte de 2013, qui a été révisé en 2017, accorde aux investisseurs des exonérations fiscalo-douanières sur une période allant de 5 à 10 ans.
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Les deux régions anglophones sont plongées dans une crise sécessionniste depuis 2017. Dans ces deux localités où vit 20% de la population camerounaise, le cacao et le café sont les deux produits phares: 45% du cacao produit au Cameroun l’est au Sud-Ouest, et75% du café arabica camerounais vient du Nord-Ouest, selon le patronat camerounais, le Gicam. Mais, dans un rapport diffusé mi-septembre, le Gicam estime que les recettes d’exportation de ces deux denrées ont chuté de 20% à cause du conflit. La production de cacao et de café pâtit de « l’insécurité et des déplacements de populations (qui) sont préjudiciables aux activités agricoles et à l’entretien des plantations ».
Quant à l’Extrême-Nord, le groupe terroriste Boko Haram y est actif depuis 2014. Dans cette partie du pays, l’impact économique est différent. Au contraire des régions anglophones dynamiques et historiquement créatrices d’emploi, l’Extrême-Nord se caractérise par un retard de développement significatif. Néanmoins face à cette guerre, les 04 millions de populations de l’Extrême-Nord ont démontré une grande capacité d’adaptation et de résilience, offrant au gouvernement camerounais et aux partenaires internationaux la possibilité de mettre en place des politiques de développement intégrant la diversité et la fluidité des traditions économiques de cette région frontalière entre le Nigéria et le Tchad.
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L’Extrême-Nord du Cameroun est un véritable carrefour de routes commerciales et de cultures. En plus du commerce, son économie est structurée autour de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche, du tourisme, du transport de marchandises, de l’artisanat et de la chasse. Le secteur informel est prépondérant et les activités de contrebande occupent une place considérable. L’économie locale est dominée par des riches commerçants et des chefs traditionnels, souvent membres du parti au pouvoir, et qui occupent des postes élevés au sein de l’administration.