Cemac : les conditions de la bourse toujours hostiles aux PME
Pour une introduction à bourse des valeurs mobilières d’Afrique centrale, la PME doit avoir des fonds propres minimum de 200 millions de FCFA, un chiffre d’affaires de 1 milliard et une capitalisation boursière minimale de 10 milliards de FCFA. Ces critères difficiles à remplir par la plupart des PME. Malgré les incitations fiscales accordées par les Etats dans le but de dynamiser le marché financier sous régional, la bourse unifiée n’attire pas les investisseurs.
« La Bourse des valeurs, une alternative attrayante pour le financement des PME & startups ». La thématique était au centre d’une conférence organisée le 24 février dernier. Y prenaient part les investisseurs, les intermédiaires et autres acteurs du marché financier sous régional. La rencontre qui s’est tenue par visio-conférence avait surtout pour objectif d’aider les entreprises, à réussir leur entrée sur le marché de la Bourse des valeurs mobilières d’Afrique Centrale (Bvmac). Egalement de la partie, Jean Claude Ngwa, Directeur général de la Bvmac a surtout exhorté les PME et porteurs de projets à solliciter cette alternative pour le financement. « Notre marché financier offre des financements longs et est suffisamment liquide. La collecte de l’épargne s’y fait auprès du grand public » a-t-il indiqué.
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S’il semble optimiste sur les bienfaits de l’entreprise dont il assure la Direction, le camerounais constate tout de même que la culture boursière dans les six pays qui composent la Cemac reste encore très faible. Opérationnelle depuis juillet 2019, la Bourse unifiée (née de la fusion entre la « Douala Stock Exchange » et l’ancienne Bourse des valeurs Mobilières de l’Afrique Centrale de Libreville) n’attire pas vraiment les investisseurs. 20 mois après la fusion des deux places boursières, le marché des introductions en Bourse est resté au point mort. A ce jour, la Bvmac ne compte que quatre valeurs sur le marché actions à savoir (Semc, Safacam, Socapalm et Siat gabon) et les volumes d’échanges sur ces titres y sont très modestes. Sans oublier le fait que la capitalisation du marché « actions » s’établit à 30 684 725 300 Francs CFA et celle des obligations totalise 554 004 630 880 FCFA. Des chiffres qui classent cette place boursière parmi les moins performantes d’Afrique. À titre de comparaison, son alter égo au sein de l’Uemoa (Brvm) affiche sur le marché actions, une capitalisation boursière de 3931 milliards de Francs CFA. Le marché obligataire, quant à lui, possède une capitalisation de 5718 milliards de francs CFA.
Les PME à l’écart
Si elles sont quotidiennement confrontés aux problèmes de financement auprès des établissements bancaires, les Petites et moyennes entreprises (PME) en activité dans la sous-région ne semblent pas séduis par le marché boursier. Celui-ci offre pourtant un accès illimité aux liquidités nécessaires et à des taux bonifiés en plus d’une plus grande visibilité en termes de valorisation de leurs investissements. De l’avis des intervenants, cette situation s’explique par une méconnaissance de ce mode de financement, la culture boursière n’étant pas encore suffisamment ancrée dans les mœurs des PME locales en quête de liquidités. Mais au-delà, il y’a l’aspect « contraignant » que revêt le choix d’une introduction en bourse pour une entreprise. « Un des éléments importants pris en compte par la bourse, c’est la transparence, le fait de communiquer ses résultats en toute clarté et honnêteté. Les critères d’évaluation majeures qui sont le plus souvent retenus sont l’Equity Story, c’est-à-dire l’historique de la société, la qualité du management, la structure de l’actionnariat et l’analyse financière » analyse Marc Kamgaing, fondateur de Harvest Asset Management.
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De l’avis de certains promoteurs d’entreprises, les conditions d’accès aux financements devraient être modelées à la taille des PME locales qui représentent un tissu important de l’économie (au Cameroun 99% des entreprises sont des PME). Pour une introduction en bourse, les PME devraient avoir des fonds propres minimum de 200 millions de FCFA, un chiffre d’affaires de 1 milliard et une capitalisation boursière minimale de 10 milliards de FCFA. Sur le compartiment obligataire, le montant minimum d’emprunt est de 250 millions de FCFA. « Ces conditions ne sont pas vraiment adaptés pour les petits entrepreneurs comme nous », lance promoteur d’entreprise qui appelle à un assouplissement. « En Afrique de l’Ouest, la place boursière offre beaucoup plus d’avantages aux PME. Il leur est demandé de disposer d’un capital social minimum de 10 millions pour accéder au marché » renchérit-il.
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