Carine Dikambi : « L’Afrique présente des opportunités pour le développement de la Blockchain »
La Directrice Afrique Francophone et de l’Est de Binance s’exprime sur l’utilité de la Blockchain au développement du continent africain et du Cameroun en particulier.
Qu’est-ce que Binance pour le camerounais et l’africain Lambda ?
Avant d’y arriver, je pense qu’il faut d’abord commencer par définir ce que sont les crypto-monnaies. En termes simples, les crypto-monnaies sont essentiellement des actifs numériques qui peuvent être utilisés pour le commerce, la gouvernance et une variété d’autres choses, elles utilisent une nouvelle technologie qui s’appelle la Blockchain que l’on peut définir de manière très simple comme un grand livre de comptes en ligne avec une cryptographie forte pour sécuriser les transactions en ligne. Si l’internet a fait du monde un village global, les crypto-monnaies et la Blockchain alimenteront l’économie de ce village décentralisé.
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Comme d’autres moyens d’échanges, la valeur d‘une crypto-monnaie dépend de l’offre et la demande ainsi que la rareté sur le marché. Mais contrairement à la monnaie fiduciaire, la crypto (diminutifs crypto-monnaie, ndlr) n’existe pas sous forme physique et donc n’est pas émise par une autorité centrale. Dès lors, Binance est une place de marché numérique (une bourse) où les gens peuvent venir acheter des cryptos contre d’autres actifs. En plus d’être une place d’échange des cryptos (la plus importante au monde en volume), Binance est un écosystème blockchain et un fournisseur d’infrastructures de crypto-monnaies avec une suite de produits financiers et nous continuons de construire des facettes essentielles de l’écosystème blockchain et de contribuer au développement d’une infrastructure industrielle plus large.
Comment la crypto peut-elle contribuer au développement d’un pays comme le Cameroun ?
La crypto peut contribuer au développement d’un pays comme le Cameroun car elle facilite l’accès à une plus grande liberté de l’argent et par conséquent une plus grande liberté économique. En tant que système ouvert et très inclusif, les crypto-monnaies et la technologie blockchain permettent aux gens d’y accéder sans conditions préalables ni qualifications. Ainsi, de plus en plus de personnes qui n’auraient autrement pas de telles opportunités sont habilitées à créer de la richesse.
Au-delà des Africains qui investissent dans les crypto-monnaies pour se prémunir contre la dévaluation de leur monnaie, ou qui utilisent les crypto-monnaies pour les paiements transfrontaliers et les envois de fonds par exemple, de nouveaux systèmes sont construits et de nouvelles structures financières émergent – tout cela conduisant en fait à une plus grande liberté financière et économique pour nos populations.
En termes de transferts de fonds et de paiements transfrontaliers, par exemple, nous avons mis sur pied une option dénommée Binance Pay qui facilite les transferts numériques dans un monde où s’affilier à une banque est devenu un véritable parcours du combattant.
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Il faut aussi préciser que l’un des principaux avantages du modèle décentralisé des crypto-monnaies est de remettre le pouvoir entre les mains des utilisateurs. Les crypto-monnaies ont été conçues comme une alternative à la finance traditionnelle et n’ont donc pas de point de défaillance unique, ce qui les rend plus résilientes, efficaces et démocratiques. La possibilité d’effectuer des transactions sur une blockchain immuable, résistante à la censure et sans autorisation, qui ne peut pas être affectée par l’hyperinflation que l’on observe si souvent dans les économies africaines, est un grand pas vers l’auto souveraineté sur leurs finances.
Vous vous déployez depuis quelque temps sur le continent africain. Quels sont vos défis ?
Notre véritable défi est lié au faible taux d’inclusion financière sur le continent. Par conséquent, nous sommes dans une phase d’éducation financière et d’information. Nous pensons organiser des évènements en présentiel dans toute la zone d’Afrique francophone ; à l’exemple de ceux qui ont eu lieu le mois de décembre 2021 dans les villes de Douala et Yaoundé.
Pour nous démarquer, nous allons relever des défis liés à la peur du jargon technique et la vulnérabilité aux escroqueries pour assurer la sécurité des utilisateurs. Dans les pays francophones qui sont réticents à s’ouvrir dans le monde de la cryptomonnaie, nous avons lancé une initiative d’éducation nommée Binance Masterclass. Elle nous permet d’enseigner les bases de la crypto à travers des audios et vidéos ; expliquer l’utilisation quotidienne et donner des astuces aux utilisateurs afin d’éviter les escroqueries. Il faut noter que toutes nos formations sont gratuites.
Nous sommes d’ailleurs une plateforme sérieuse en bonne et due forme, le no 1 en termes d’actifs au monde avec plus de 180 millions d’utilisateurs. La phase d’éducation permettra aux utilisateurs d’opérer en toute sécurité. Côté sécurité, nous avons mis sur pied un fond d’assurance pour nos utilisateurs appelé SAFU (Secure Asset Fund for Users, ndlr), un fonds d’assurance d’urgence qui a été créé par Binance en juillet 2018 pour protéger les fonds des utilisateurs et pour prévenir contre les arnaques.
N’est-ce pas un combat perdu d’avance dans un pays comme le Cameroun qui souffre d’une très faible inclusion financière ?
Nous sommes très investis en Afrique car le continent présente de nouvelles opportunités tangibles pour le développement de l’écosystème Blockchain. Au fur et à mesure que le marché mûrit et que les utilisateurs augmentent, la relève de la Blockchain en Afrique est inévitablement prospère. Actuellement le marché francophone dans son ensemble présente un réel intérêt dans l’entreprise et nous ne pensons pas que c’est un combat perdu d’avance. Par ailleurs, avec l’utilisation quasi omniprésente des téléphones mobiles sur le continent, l’accès aux plateformes de trading de crypto-monnaies s’avère facile. Et comme le coût d’accès aux plateformes de crypto-monnaies est faible, de nombreux utilisateurs peuvent les utiliser pour transférer de l’argent en raison de leur coût inférieur à celui des banques traditionnelles donc nous ne pensons pas que c’est un combat perdu d’avance, nous mettrons à la disposition des utilisateurs une bonne stratégie de communication et ils verront de plus en plus la réalité de l’écosystème des produits financiers que nous développons.
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Nous construisons des facettes de l’écosystème avec des produits comme Binance NFT qui tourne autour de l’art. Dans nos activités, on privilégie le caractère abordable, la rapidité et l’accessibilité pour favoriser l’adoption massive de la crypto-monnaie.
En quoi est-ce que la blockchain Binance Smartchain pourrait être utile pour les ingénieurs et porteurs de projets camerounais ?
C’est une plateforme qui offre des outils de programmation complets permettant aux utilisateurs de créer des applications décentralisées. Si par exemple un startuper apprend à coder sur les Blockchains, il peut en retour créer sa propre application sur la Binance Smartchain, et devenir créateur d’application et ainsi contribuer au développement économique.
De plus, l’accès aux plateformes de blockchain et de crypto-monnaies permet également à la main-d’œuvre de travailler à distance pour des start-ups de l’espace crypto et blockchain qui se trouvent hors du pays ou du continent.
En dehors des séminaires de formation que vous avez récemment organisés dans les villes de Douala et Yaoundé, comment comptez-vous vous déployer davantage pour mieux impliquer les camerounais dans votre écosystème ?
Nous avons décidé de devenir partenaire officiel de la CAN Total Energies 2021 qui s’est déroulée au Cameroun afin de vulgariser nos activités sur le continent, et de sensibiliser le grand public à travers le football africain pour une adoption de la crypto. Pour notre stratégie de déploiement à long terme, nous visons l’éducation en ligne et en présentiel, des formations gratuites, lier des partenariats avec des structures et institutions de formations locales qui accueillent beaucoup de jeunes.
Vous êtes sans ignorer que la circulation des crypto actifs n’est pas encore autorisée dans la sous-région Afrique centrale. Comptez-vous évoluer en marge des orientations de la Cosumaf ?
Nous ne cherchons pas à entrer en opposition avec les régulateurs. Les crypto-monnaies et même la réglementation des crypto-monnaies sont des concepts très récents – un peu plus d’une décennie d’existence. En tant que tel, de nombreux acteurs de la crypto, y compris Binance, s’autorégulaient par le biais de politiques KYC/AML lorsque les régulateurs étaient peu clairs.
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Maintenant, comme les régulateurs ont montré un intérêt dans l’espace, je pense que la collaboration réglementaire avec les principaux acteurs de l’écosystème blockchain est essentielle. Chez Binance, nous nous tenons activement au courant des politiques en constante évolution dans l’industrie de la crypto et continuons à adopter une approche collaborative dans le travail avec les régulateurs. Ensemble, nous pouvons trouver le moyen optimal d’établir un terrain de jeu équitable, car la protection des consommateurs est importante pour nous tous. En ce qui concerne les autorités camerounaises, j’ai participé le 15 décembre dernier à un atelier avec le Minpostel sur les enjeux, les risques des crypto-monnaies. Je pense que le Gouvernement camerounais est en train de s’enquérir de la situation.
La crypto monnaie est-elle un danger pour la finance traditionnelle ?
Pas du tout. Pour moi, il y a de la place pour des situations mutuellement bénéfiques pour les deux systèmes. On a de grandes entreprises de technologies (Paypal) qui intègrent des systèmes cryptographiques et on voit que les banques centrales du monde entier sont déjà en train de créer leur propre monnaie numérique qui repose sur une blockchain. C’est plus une opportunité qu’un danger à mon avis.
Qui êtes-vous et quels sont les idéaux que vous défendez ?
Je suis de nationalité camerounaise, je suis née à Paris et j’ai grandi entre Paris et New York. J’ai eu mon premier emploi dans la finance traditionnelle à Wall Street, au sein d’une banque d’investissement française. Après cette entreprise, j’ai tour à tour travaillé pour CitiGroup en tant que Vice-présidente des risques de marché, American Express comme Directrice dans le département des risques, où je travaillais en gestion de données. Je rencontre la technologie blockchain en 2016. Avec l’aide de mon mentor et des informaticiens, je me suis mieux outillée sur la blockchain et je suis devenu un investisseur de crypto actifs. Je défends des valeurs telles que la liberté de l’argent, l’éducation, le partage de l’information etc.
Peut-on investir dans les crypto-monnaies sans en acheter ?
En effet, outre l’achat et l’investissement en crypto-monnaies, de nombreuses personnes gagnent aujourd’hui leur vie en crypto-monnaies, qu’il s’agisse de salaires ou de simples marchands, magasins et autres qui acceptent les crypto-monnaies comme moyen de paiement pour leurs biens ou services.
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De même, des éléments de Finance décentralisée (DEFi) comme les jetons non fongibles aussi appelés NFT permettent aux créateurs de gagner de l’argent en symbolisant et tokenisant leur travail. La GameFi permet également aux étudiants et aux autres jeunes de gagner jusqu’à 25 dollars par jour en jouant à des jeux basés sur la blockchain.
Un message à l’endroit des potentiels investisseurs sur les opportunités qu’offre l’écosystème Blockchain ?
Si je devais dire une dernière chose, ce serait insister sur le fait que la cryptomonnaie ne repose pas que sur le trading. Il y’a tout un écosystème autour de la crypto. L’écosystème de la Blockchain offre certes une opportunité énorme aux traders mais une plus grande adoption de la blockchain ouvre la porte à plus d’opportunités pour de nombreuses entreprises afin de développer encore plus d’applications basées sur la blockchain et de créer plus d’opportunités d’emploi. Je pense que l’avenir du Cameroun sera beaucoup plus brillant grâce à cela.
Propos recueillis par Cédrick Jiongo