Cameroun : la Cicam veut réévaluer son patrimoine immobilier pour réduire son déficit des capitaux
Un appel d’offres y afférent vient d’être lancé par la direction générale de cette entreprise publique afin de la sauver d’une éventuelle dissolution.
Edouard Ebah Abada, le directeur général (DG) de la Cotonnière industrielle du Cameroun (Cicam) vient de lancer un appel d’offres national ouvert en vue du recrutement d’un consultant pour la réévaluation des terrains bâtis et non bâtis de cette entreprise publique, spécialisée dans le domaine du textile et au bord de la faillite. Ceci afin de « présenter une meilleure situation financière des capitaux propres », explique le DG dans son appel d’offres. Il précise que cette opération vise également à se conformer à l’article 665 du droit comptable qui stipule que : « Si la dissolution n’est pas prononcée, la société est tenue, au plus tard à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes est intervenue, de réduire son capital, d’un montant au moins égal à celui des pertes qui n’ont pu être imputées sur les réserves si, dans ce délai, les capitaux propres n’ont pas été reconstitués à concurrence d’une valeur au moins égale à la moitié du capital social ».
En d’autres termes, si la Cicam ne réévalue pas ses actifs afin de renforcer ses capitaux propres, elle pourrait être obligée, entre autres, de réduire son capital. Raison pour laquelle le consultant qui sera recruté doit procéder à une évaluation de terrains nus et bâtis afin de leur attribuer une valeur actuelle en fonction du prix du marché. Le coût prévisionnel de cette opération est de 23,8 millions de FCFA. Les candidats doivent déposer leur offre au plus tard le 22 janvier 2024. Les sites des terrains bâtis et non bâtis à réévaluer sont situés dans les villes de Douala et Garoua.
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Si la Cicam procède à cette réévaluation de ses actifs immobiliers, c’est sur recommandation de la Commission technique de réhabilitation des entreprises du secteur public et parapublic (CTR). Dans son rapport 2022, cet organisme public qui fait l’état des lieux des entreprises publiques et des établissements publics avait préconisé qu’afin d’éviter la dissolution de l’entreprise, l’incorporation de l’écart de la réévaluation des actifs immobiliers et le traitement de la dette par subrogation de l’Etat sont à envisager en vue de reconstituer les fonds propres et assainir le bilan de l’entreprise.
La Cicam va mal après 59 ans d’existence. Elle présente une situation financière alarmante car, les capitaux propres sont devenus inférieurs (-16,3 milliards de FCFA) à la moitié du capital social (1,5 milliard de FCFA). Selon le rapport 2022 la CTR, la détérioration des indicateurs financiers de la Cicam se poursuit dans un environnement marqué par la hausse du coût moyen du coton de 8,43% et la forte concurrence des produits textiles en provenance d’Asie qui occupent 88% du marché du pagne. Les perturbations liées à la fourniture intermittente de l’énergie électrique, des matières premières et des intrants, ont conduit à la baisse de la production des imprimés et tissus teints (3 906 kml pour une capacité attendue de 18 000 kml contre 5 346 kml en 2021), la régression de la production colisée d’éponge de 49,69%, une production quasi inexistante de la teinture (0,76%) et le faible rendement de l’activité de filature (34%). Cette baisse généralisée des performances sur le plan technique a eu pour conséquence la réduction du chiffre d’affaires de 29%.
Au 31 décembre 2022, indique la CTR, la Cicam totalise une dette globale évaluée à 31 milliards de FCFA, dont 74% représentent les dettes à court terme. En raison de l’absence de trésorerie, le stock de la dette est en hausse de 17,22% et impacte fortement les relations de Cicam avec ses principaux fournisseurs (Eneo, Sodecoton, Gaz du Cameroun), matérialisées par des suspensions répétées en fourniture d’énergie et en matière premières. Bien plus, l’insuffisance du fonds de roulement qui découle de la trésorerie négative nette de l’entreprise, ne permet pas de régulariser la situation du personnel, qui accumule des arriérés de salaire de 7 mois (de juillet à décembre 2022) estimés à 523 millions de FCFA. Cette situation concourt à la diminution des effectifs (-8%) du fait des démissions et absences injustifiées avec pour conséquences la perte du savoir-faire technique, la démotivation des salariés restants, et la dégradation du climat social.
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