Cameroun : Ce qui va changer avec la Caisse des dépôts et consignations
La nomination le 20 janvier 2023 de ses tout premiers dirigeants annonce l’entrée en activité imminente de cet organisme attendu depuis 15 ans.
Deux mois à peine après la tenue à Yaoundé du Forum des Caisses de dépôts d’Afrique, le président de la République, Paul Biya, a signé le 20 janvier dernier un décret portant nomination du directeur général, du directeur général adjoint et du président du conseil d’administration de la Caisse des dépôts et consignations (CDEC) du Cameroun. Il s’agit, respectivement, de Richard Evina Obam, qui va cumuler dans un premier temps avec ses fonctions de directeur général de la Caisse autonome d’amortissement (CAA), l’organisme qui gère la dette publique de l’Etat, de Geneviève Kingue Ewane, et de Sylvester Moh Tangongho, actuel directeur général du trésor au ministère des Finances (Minfi).
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Ces nominations annoncent en effet l’entrée en activité imminente de cet organisme attendu depuis 2008 et dont la mise en place était appelée de tous leurs vœux par les experts ces dernières années, notamment en raison du rôle clé qu’il est censé jouer dans la centralisation des dépôts des notaires ou des professions juridiques, des fonds de retraite et des régimes de retraite des fonds d’assurance et de garantie, des consignations administratives et des cautionnements, etc. D’après le Minfi, la CDEC aura en charge « de collecter, sécuriser et rentabiliser sur le long terme les ressources généralement « oisives », pour les orienter vers l’accompagnement des politiques publiques ».
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Suivant la loi de 2008 régissant les dépôts et consignations et organisée par le décret N° 2011,-105 du 15 avril 2011, les ressources publiques et privées entrant dans le champ de la CDEC sont classés en 4 catégories : les dépôts (fonds des clients détenus par des auxiliaires de justice, dépôts effectués par les notaires, administrateurs et mandataires judiciaires, en exécution de leurs fonction, les fonds issus des comptes inactifs des établissements bancaires…), les consignations administratives (cautionnement des comptables publics et des officiers publics ministériels, cautionnement sur les marchés publics, les consignations pour main d’œuvres pénales…), les consignations judiciaires (cautionnement de mise en liberté, fonds provenant des règlements judiciaires et liquidation des biens, fonds placés sous séquestre…) et les consignations conventionnelles (cautionnement auprès des entreprises d’eau, d’électricité, de téléphones …)
« Ces ressources qui ne sont pas, pour le moment accessibles, constituent des niches de financement importantes qui seront collectées, sécurisées et rentabilisées par la CDEC, dont le potentiel est en cours d’évaluation » a réagi Richard Evina Obam dans une récente interview. Des ressources qui devraient permettre à l’État central d’activer de moins en moins le levier de l’endettement pour financer ses investissements. « Il s’agit en effet d’un levier complémentaire sur lequel les politiques publiques pourraient s’appuyer pour concrétiser la vision stratégique de développement, en mobilisant des ressources alternatives nécessaires. Au vue du poids important de la dette publique, le recours à un outil de financement alternatif pareil, s’avère indispensable notamment pour le financement de la SND-30 en vue de l’émergence du Cameroun à l’horizon 2035 » renseigne le nouveau et premier DG de la CDEC.
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Doublon
Par ailleurs, il est attendu que tout l’argent qui est dans les comptes d’attente des banques soit déposé désormais à la Caisse des dépôts et consignations. Implication directe : les banques ne vont plus tourner avec l’argent des successions, par exemple. Un expert contacté par EcoMatin souligne que la Caisse de dépôts conserve aussi les titres émis par l’État, à l’instar des obligations de trésor des emprunts obligataires. « Avec les revenus générés par ces dépôts, consignations et titres, la Caisse de dépôts est un important instrument de financement des projets de l’État. C’est en réalité une très grosse banque de financement », commente-t-il. Dans d’autres pays, cet organisme gère même l’argent des pensionnés. Mais, au Cameroun cette compétence continuera d’être exercée par la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS), pour ne pas faire doublon.