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Budget d’investissements publics : trois marchés frontaliers abandonnés à l’Est

Dans sa volonté politique, le Chef de l'État Paul Biya, lors de la campagne en vue de sa réélection en 2011 avait annoncé un vaste programme d'investissements prioritaires. Dans la région de l'Est, les communes de Garoua-Boulai, Gari Gombo, et Moloundou ont bénéficié de ce programme à travers l'attribution des marchés frontaliers pour booster les transactions commerciales avec les pays voisins, dont la RCA et le Congo Brazzaville. Ces infrastructures évaluées à plus de 1,5 milliard de FCFA devraient aussi propulseur l’économie de ces localités afin de lutter contre le chômage et la pauvreté. Depuis 7 ans, aucun de ces projets n’est fonctionnel. Entre projets non maturés, inachevés ou construits sur des sites inappropriés, la volonté présidentielle est brisée.

L’espoir des commerçants de  Garoua-Boulaï, de fructifier leurs affaires avec la République Centrafricaine grâce à la construction d’un marché frontalier est resté vain depuis le lancement du chantier en 2015. Ce projet d’envergure devrait booster les  transactions commerciales entre les deux pays. Sur le site ce 22 novembre 2021, le constat est alarmant. Des bâtiments abandonnés dans la broussaille et vandalisés par les populations riveraines. Egalement, le matériel que l’entreprise avait acheté et stocké a été emporté par des malfaiteurs. Pourtant, à la date du 8 mai 2017, les travaux avaient déjà été réalisés à 40%. Dans une correspondance au ministre de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire (Minepat), maître d’ouvrage du marché, le directeur général des Ets New Services indiquait que « ces travaux étaient déjà exécutés à 40% au moment de la première interruption le 09 novembre 2016 ». Selon la délégation régional du Minepat un décompte de 141 109 745 FCFA a été payé au prestataire. Pour justifier cet arrêt des travaux, l’entreprise allègue « les surcoûts liés au transport du gravier ». Les services financiers de cette entreprise déclarent avoir dépensé pour cela 187 058 872 FCFA par rapport au marché initial. En effet, les parties s’accordent pour dire que « ce montant est jugé excessif, soit près de 22% du montant global du marché qui est de 866 813 088 FCFA et environ 68% de ce qui est prévu, 277 073 150 FCFA, de cette première tranche ferme ». En réalité, apprend-on à la délégation régionale des Travaux publics de l’Est et au Minepat, « l’entreprise avait prévu de se ravitailler en gravier dans une carrière sur la route de Meiganga ». Malheureusement, la matière recherchée est rare.

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De l’autre côté, les espoirs nés de la carrière d’Ebaka, située à Bélabo, à près de 350 km de Garoua-Boulaï, fondent comme neige au soleil. Camrail, qui l’exploite cette carrière, déclare ne plus vendre le produit du fait de sa diminution. Du coup, déclare le DG des Ets New Services, Jérémie René Tchuenkam, « il ne restait plus que la solution de Yaoundé pour nous approvisionner en gravier, soit à près de 700 km du site du projet. » Ce qui peut expliquer que, selon le compte-rendu d’une réunion dite de crise tenue le 28 juillet 2017 au Minmap entre les différentes parties (Minepat, Minmap, Mintp et entreprise ndlr), « au 27 juillet 2017, le taux d’exécution des travaux est de 55,17%, pour une consommation des délais est de 180% ». Selon l’ingénieur du marché au cours de cette réunion, « l’entreprise a été mobilisée avant la maîtrise d’œuvre (exercée par la délégation départementale du Lom-et-Djerem et sans que le site d’exécution des travaux ne soit choisi ». La même source rencontrée récemment indique que « les problèmes de ce marché commencent avec sa conception qui [nous] a été envoyée sous forme d’avant–projet sommaire (APS) ». « Au final, s’accordent à dire les différentes parties, très peu de réalisations sur le terrain sont conformes aux plans». Finalement, l’on retient que ce projet avait besoin d’un recadrage au lieu de « tout casser».

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Le redémarrage des travaux est prévu d’ici la fin de l’année car les Ets New Services ont obtenu une prorogation des délais et un réajustement des surcoûts pour l’approvisionnement en gravier, selon une source à la délégation régionale des Travaux publics de l’Est. Rappelons que le projet de construction du marché frontalier de Garoua-Boulaï est le lot n°3 des travaux de construction des marchés frontaliers dans certaines localités du Cameroun (phase pilote), objet d’un marché passé après l’appel d’offre national ouvert du 12 juillet 2015. Selon l’ordre de service signé le 2 novembre 2015, les travaux, évalués à près de 900 millions de FCFA entièrement financés par le budget d’investissement public (BIP), exercice 2015, devaient s’achever en 16 mois.

L’absence ligne budgétaire à Gari-Gombo

A Gari-Gombo dans le département de la Boumba-et-Ngoko, les travaux de construction d’un marché frontalier lancés en novembre 2014 pour un financement initial d’environ 400 millions FCFA ont aussi été abandonnés. Selon un rapport de la délégation régionale du Minepat qui assure le suivi des travaux, « en un mois, le bloc administratif, les fondations et poteaux du premier hangar, le bloc des toilettes jusqu’au chainage, 3 blocs de 05 boutiques (début de crépissage) sont déjà réalisés. Sur la qualité des travaux déjà effectués, les ouvrages mis hors d’eau peuvent être considérés comme exempts de détérioration. Pour ceux des travaux exposés aux intempéries (poteaux pour hangar, bloc latrine, boutiques) des sondages sur leur stabilité devront être effectués avant toute reprise des travaux ». Malheureusement, dès la présentation des premiers décomptes, les Ets Manu Sarl, adjudicataire de ce marché apprennent qu’il n’y a pas une ligne budgétaire pour ce projet. « A un moment, il a été question de résilier le contrat entre les parties. Une position qui mettrait à mal une entreprise qui ne demandait qu’à achever les travaux qu’on lui avait confiés », affirme une source à la délégation régionale des Travaux publics. Surtout que, pendant ces atermoiements, l’entreprise avait continué à exécuter ces travaux en espérant être payée. Au point d’avoir des tensions de trésorerie et de tenter de récupérer, en vain, sa caution bancaire. Finalement, le chantier est arrêté. Non sans y avoir dépensé environ 200 millions de FCFA.

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Pour ce marché cependant, l’espoir est de nouveau permis. En effet, le 4 août 2021, à travers une lettre adressée à son délégué départemental de la Boumba et Ngoko, le ministre de l’Economie, de la Planification et de l’aménagement du territoire, Alamine Ousmane Mey, a décidé de la reprise des travaux de ce marché frontalier. « En vous communiquant l’imputation budgétaire 94 709 07 110000 2226, exercices 2021 et suivants, pour le financement des travaux de construction du marché frontalier de Gari-Gombo, département de la Boumba et Ngoko, région de l’Est, exécutés par l’entreprise Manu Sarl,  pour un montant global TTC 287 452 584 FCFA, j’ai l’honneur de vous demander de prendre toutes les dispositions nécessaires, en concertation avec les parties prenantes (délégué départemental des travaux publics et le maire de Gari-Gombo) pour la reprise et l’achèvement desdits travaux », instruit le ministre Alamine Ousmane Mey à son collaborateur.

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Enfin à Socambo dans l’arrondissement de Moloundou, département de la Boumba-et-Ngoko, c’est une rondelette somme de 300 millions de FCFA enterré dans cette localité dans la construction d’un marché frontalier. L’infrastructure est déjà achevée et réceptionnée mais inexploitée. Au départ, et selon la délégation régionale du Minepat « ce marché était destiné à Moloundou, le chef-lieu de la commune éponyme. Une ville frontalière avec le Congo-Brazzaville. Là-bas, cette infrastructure aurait pu jouer pleinement son rôle». Mais pour des raisons qui échappent à toutes les études économiques, le maire de l’époque avait déplacé le projet pour la localité, certes également frontalière, de Socambo mais qui souffre de la rude concurrence de la troisième ville congolaise de Ouesso, située à quelques kilomètres de là. Tous les trois marchés frontaliers cités plus haut font parti d’un un vaste programme d’investissements prioritaires instruit par le président de la République Paul Biya, lors de la campagne en vue de sa réélection en 2011. Malheureusement depuis leur démarrage il y a 7 ans, aucun de ces projets n’est fonctionnel.

Martin Foula

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