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Budget 2021 : Paul Biya demande des efforts titanesques au gouvernement

L’ambition est légitime mais semble hors de portée. Déjà, les prévisions annuelles et les hypothèses macroéconomiques sont bien en deçà des objectifs de la Vision 2035.

En 2020, selon les perspectives révisées en avril, la croissance économique devrait reculer de 1,1%. Une première depuis 30 ans. Néanmoins, le président n’entend pas changer de cap en matière d’objectif de développement à long terme. Aussi a-t-il prescrit au gouvernement de « s’assurer l’avancée vers l’atteinte des objectifs d’émergence à travers la transformation structurelle de l’économie ». Cette transformation structure sera encadré par la loi de modernisation de l’économie, portant orientation programmatique de la stratégie nationale de développement du Cameroun pour la période 2020-2030. Déjà, le pays s’est doté d’un Document de stratégie pour la croissance et l’emploi (Dsce) sur la période 2010-2019, première phase de la vision du développement du Cameroun à l’horizon 2035, « Vision 2035 ».

Le Dsce avait pour objectifs stratégiques de porter la croissance économique à un rythme moyen de 5,5% par an ; ramener le taux de pauvreté de 39,9% en 2007 à moins de 28,7% en 2020, et, réduire d’un tiers le taux de sous-emploi, soit plus de 75,4% en 2005 à moins de 50% en 2020. A échéance le 31 décembre 2019, force est de constater qu’aucun de ces objectifs n’a été atteint. Ce, malgré plus de 36 000 milliards de FCFA de ressources publiques dépensées en dix ans. Pour atteindre ses objectifs, le gouvernement n’a pas lésiné sur les moyens. D’abord, un comice agropastoral en janvier 2011 pour jeter les bases de l’agriculture de seconde génération. La politique de développement du secteur rural qui en découlait devait résoudre l’épineux problème de l’insuffisance de financements, qu’il s’agisse d’investissements publics ou privés, remédier à diverses autres anomalies telles que le manque de matériel végétal et animal amélioré, les difficultés d’accès à la terre, la faiblesse du taux d’encadrement, la médiocre productivité des terres, l’ampleur des pertes post-récoltes, l’enclavement des bassins de production, la longueur des procédures de paiement, l’inadéquation du système des marchés par rapport au calendrier agricole.

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Croissance où es-tu ?

Pour devenir un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure d’ici 2035, comme il l’envisage dans sa stratégie de développement à long terme intitulée « Vision 2035 », le Cameroun devra accroître sa productivité et donner à son secteur privé la pleine mesure de son potentiel. « Il s’agit là de défis titanesques qui peuvent toutefois être relevés », commente la Banque mondiale dans le Mémorandum économique du Cameroun, une revue des politiques publiques publiée en décembre 2016. Selon la Vision 2035, l’objectif global sur la période 2030 vise à atteindre le niveau de pays à revenu intermédiaire (revenu/hab. compris entre 3 706 et 11 455 dollars en valeur de 2007). Plus précisément, préviennent les économistes, le Cameroun doit enregistrer une croissance du PIB réel d’environ 8 %, soit 5,7 % par habitant sur la période 2015–2035. Il faudra pour cela que le taux d’investissement passe d’environ 20% du PIB en 2015 à 30 % en 2035 et que la croissance de la productivité atteigne 2% sur la même période, partant d’un taux moyen nul au cours de la dernière décennie. Le stock du capital physique s’est amélioré avec la réalisation des grands projets d’infrastructure au cours de la dernière décennie. Ce qui a permis, entre autres, de porter la capacité énergétique de 933 MW en 2009 à environ à 1517 MW à fin juin 2019 ; renforcer la densité du réseau bitumé qui est passée de 0,27 km/1000 hbts à 0,32 km/1000 hbts et, améliorer le taux de pénétration d’internet a été porté à 30%. Ce qui reste bien en deçà des objectifs. Par exemple, il y a un gap de 1483 MW par rapport à l’objectif fixé de 3000 MW en 2020. En outre, 63,2% des ménages ont accès à l’électricité sur une cible de 70%.

Capital physique

Au niveau des infrastructures de transport, le port de Kribi est déjà opérationnel; le deuxième pont sur le Wouri est achevé aussi, en attendant la fin des travaux complémentaires, déjà exécutés à 70% ; l’autoroute Douala-Yaoundé est réalisée à 40%. Concernant le secteur rural et la protection de l’environnement, on note une augmentation de près de 50% de la croissance annuelle du PIB dans le secteur entre 2013 (5,3%) et 2016 (7,9%). Cependant, cette performance ne permet pas de résoudre entièrement la question de l’insécurité alimentaire. En effet, «16% des ménages au Cameroun souffrent encore d’insécurité alimentaire avec une accentuation du phénomène dans la partie septentrionale», reconnait le gouvernement.

Moins de pauvreté, plus d’inégalités

En matière d’emploi, il y aurait une tendance à la hausse du taux de sous-emploi global. Les jeunes étant les plus frappés par ce fléau qui alors que les régions de l’Extrême-Nord (86,7%), du Nord-ouest (84,2%), du Nord (83,6%) et de l’Ouest (82,6%) enregistre le taux de sous-emploi le plus élevé chez les jeunes. Si une légère baisse a été observée en matière de pauvre et d’inégalité entre 2007 et 2014 qui est passée de 39,9 à 37,5%. Mais cette baisse reste loin de l’objectif de 28,7% en 2020. Bien plus, on note une hausse de la pauvreté en milieu rural, une augmentation des inégalités qui se traduit par une hausse de 13% de l’indice de GINI. Pour ce qui est des infrastructures, seulement 14% des 17 000 logements sociaux prévus étaient achevés à fin 2018 soit 2800 appartements. En 2015, le taux d’accès des populations aux services urbains de base était de 35%. Et rien ne dit que l’objectif sera atteint d’ici la fin de l’année.

Insécurité sociale

En matière d’éducation, de recherche et d’innovation, les réformes entreprises dans le secteur ont globalement permis des améliorations. Le taux de préscolarisation a progressé en passant de 37,5% en 2015 à 39% un an plus tard. Entre 2004 et 2014, le taux net de fréquentation scolaire au niveau du primaire est passé de 78% à 85% tandis que le taux net de fréquentation au secondaire est passé de 33% à 53%. Le taux d’achèvement universel des six années du cycle primaire est passé de 73% en 2012-2013 à 74,2% en 2014-2015, puis 76% en 2016-2017 pour se situer à 76,7% en 2017-2018. Le nombre de personnes socialement vulnérables bénéficiaires d’appuis en ressources productives, d’assistance multiforme et insérées ou réinsérées et économiquement autonomes est passé de 275 100 en 2016 à 370 038 en 2018 soit une hausse de 34,5% ; pas loin de la cible de 500 000 en 2020. Par contre, le taux de couverture sociale de la population active (13,9%) soulève un certain irréalisme par rapport à la cible de 100% fixée en 2020. De même, 2000 ménages étaient en situation de pauvreté chronique bénéficiant de transferts sociaux en 2015. En cinq ans, il aurait fallu multiplier ce chiffre par 20 soit 40 000, pour atteindre la cible en dans quelques semaines en 2020.

Lire aussi : Calendrier budgétaire 2020 : le gouvernement hors délai

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