Beac : le personnel redoute un plan social
Malgré les assurances d'Abbas Mahamat Tolli, le Gouverneur de la Banque des Etats de l'Afrique centrale (Beac), les employés de cette institution craignent une réduction des postes ou une baisse des salaires, au moment où sont déjà observées d'importantes coupes budgétaires. La situation de la banque a été au centre d'une réunion tendue entre le Gouverneur de la Beac et son personnel le 5 avril 2019.
Dans sa note de conjoncture 2018, la Banque des Etats de l’Afrique centrale dégageait un solde de son compte courant de 1.579,082 milliards de FCFA, correspondant aux liquidités disponibles pour l’ensemble des 6 Etats de l’Afrique centrale. La même note de conjoncture place le Cameroun en tête des pays dont les réserves sont les plus importantes. Yaoundé a ainsi affiché en 2018 des réserves de liquidités Beac de 675,092 milliards de FCFA. Le Gabon, 2ème dans ce classement, enregistre des liquidités d’un montant de 389,8 milliards de FCFA. 250,38 milliards FCFA pour la Guinée équatoriale, 3ème. Le Congo, 4ème, avec 197,28 milliards de FCFA. Le Tchad, 5ème, avec 48,75 milliards de FCFA, et la RCA, 6ème avec 35,78 milliards de FCFA. A la Beac, on se réjouit de « la soutenabilité des réserves des pays membres ».
>> Lire aussi – La BEAC au rythme des scandales
Quant aux avoirs des 6 pays dans le compte des opérations logé au Trésor français pour le compte de l’exercice 2018, le montant des dépôts est évalué à 3359,8 milliards de FCFA. Ici également, le Cameroun dispose du plus grand portefeuille avec 1945,2 milliards de FCFA. Suivi du Gabon dont la quote-part est fixée à 638,9 milliards de FCFA. La Centrafrique, 200,7 milliards de FCFA, le Congo 182,4 milliards de FCFA, le Tchad, 74,4 milliards de FCFA. Et -32,3%, pour la Guinée Equatoriale. La Beac quant à elle dispose de 350,4 milliards de FCFA dans ce compte. Si le solde des comptes courants des six pays de la Cemac et celui du compte des opérations du Trésor français affichent des résultats sensiblement positifs par rapport à 2017, la situation financière de la zone préoccupe néanmoins. La question a d’ailleurs sérieusement été évoquée lors du récent sommet des chefs d’Etat de la Cemac de Ndjaména, ainsi qu’à l’occasion de la rencontre des ministres des finances de la Zone Franc au Niger. Tout comme à la 8ème session du Comité de pilotage du Programme des réformes économiques et financières de la Cemac tenu à Douala, le 31 mars 2019.
L’ère Lucas Abaga Nchama
Preuve de cette morosité financière, la demande d’appui formulée par Daniel Ona Ondo, le président de la Commission de la Cemac, auprès de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (Fmi). Les 6 pays peinent sérieusement à financer sous fonds propres, le Pref Cemac, le Programme de réformes économiques et financières et le Per Cemac, le Programme économique régional, deux programmes intégrateurs de la sous-région. Plusieurs sources à l’intérieur de la Beac confirment d’ailleurs le climat tendu au sein de la banque centrale de la Cemac.
« Abaga Nchama a sérieusement affecté les comptes de la Beac. Nous sommes dans de sérieuses turbulences », dévoile une source crédible à la Beac. L’ex-Gouverneur de la Beac de 2010 à 2017 aurait ainsi laissé la banque centrale dans un état déplorable, à en croire notre source. « Des coupes drastiques ont été opérées partout ailleurs. C’est ainsi depuis l’an dernier », ajoute notre informateur, extrêmement pessimiste sur la situation de la Beac.
>> Lire aussi – Cemac : la Commission à l’heure de l’austérité
Le Vendredi 5 avril 2019, une réunion cruciale a d’ailleurs rassemblé le Gouvernement de la Beac et son personnel. Au terme de cette concertation couperet, Abbas Mahamat Tolli, le Gouverneur de la Beac va rassurer son personnel, inquiet: « Pour le moment, des coupes sur les salaires ne sont pas à l’ordre du jour », dira-t-il. Des assurances accueillies avec réserves par un personnel exerçant dans un climat tendu et un profond malaise depuis le départ de Lucas Abaga Nchama, dont la gestion est fortement contestée. L’ex-Gouverneur de la Beac vient d’ailleurs d’être limogé de son poste de ministre de l’Economie et des Finances de la Guinée Equatoriale pour « irrégularités commises dans l’exercice de ses fonctions ». Malgré l’optimisme d’Abbas Mahamat Tolli, on annonce depuis l’exercice 2018 « des coupes budgétaires drastiques dans plusieurs postes de dépenses de la banque ». Le personnel de la Beac redoute par ailleurs l’imminence d’un plan social au sein de la banque.