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Accès à l’eau : la société civile met en garde les gouvernements africains contre les programmes de privatisation

L'ONG Cappa, en collaboration avec la coalition Our Water Our Right Africa, a organisé un webinaire avec des militants africains pour la justice de l'eau, afin de commémorer la 12ème année de la résolution des Nations déclarant l'eau et l'assainissement comme un droit humain.

Le webinaire, organisé conjointement par le Corporate Accountability & Public Participation Africa (Cappa), l’African Women Water Sanitation and Hygiene Network (Awwashnet), Ecumenical Water Network – Africa (EWN/A) et la coalition Our Water Our Right Africa, a été suivi par le public de façon globale, des activistes syndicaux, des membres de la société civile et des médias,  des représentants de plusieurs pays d’Afrique, dont l’Afrique du Sud, le Cameroun, le Gabon, le Ghana, le Kenya, le Mozambique, le Nigeria, le Sénégal, la Sierra Leone et l’Ouganda,  ainsi que de la communauté internationale, avec la participation du Réseau africain pour la justice de l’eau. Le webinaire a été décrit par la modératrice, Aderonke Ige de Cappa, comme une « évaluation diagnostique de l’état des ressources en eau sur le continent africain depuis la résolution des Nations Unies il y a 12 ans ». Les panélistes, tout en partageant leurs expériences nationales en matière de gouvernance de l’eau, ont également examiné les interactions entre justice, genre, santé, biosécurité, dignité humaine, inclusion et droits des travailleurs.

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Les panélistes, tout en partageant leurs expériences nationales en matière de gouvernance de l’eau, ont également examiné les interactions entre justice, genre, santé, biosécurité, dignité humaine, inclusion et droits des travailleurs. Tous les intervenants ont unanimement identifié la privatisation comme une menace majeure pour la justice de l’eau en Afrique, couvrant plus d’une décennie de commercialisation et d’accaparement de l’eau par des sociétés telles que Suez et Veolia, avec des moteurs du programme de privatisation qui sont la Banque mondiale, le FMI, la BAD et d’autres institutions financières internationales. Selon Anne Maina, coordinatrice de Biodiversity & Biosafety Association of Kenya, les communautés du Kenya sont confrontées à des menaces de privatisation depuis des décennies. Pour elle, Veolia et Suez, qui sont les principales sociétés à l’avant-garde du monopole de l’eau, ont obtenu d’importants contrats de consulting et de construction au Kenya, renforçant ainsi leur présence dans le pays et sur le continent africain en général. Elle a révélé comment les syndicats et la société civile se sont défendus aux côtés des grandes communautés du Kenya pour qui l’eau est plus qu’une simple commodité à acquérir, mais une question de vie ou de mort!

Selon Chief Ewoukem Atabong du Synateec, il est important de débarrasser le secteur de l’eau de la corruption afin d’atteindre l’efficacité. Pour le syndicaliste camerounais, le Cameroun a connu les « deux mondes », et avec les terribles expériences du régime de privatisation, il est logique que le pays ne retombe pas dans ce piège.

Dans sa présentation, Veronica Nwanya de Awwashnet a déclaré que la nature sexospécifique de la crise de l’eau, comme de nombreuses autres crises sociales, économiques et politiques, ne peut être ignorée. Pour elle, il est impératif que les femmes ne soient pas négligées ou lésées dans la formulation des politiques et de gouvernance. Elle a soutenu que les femmes sont culturellement chargées de la plupart des responsabilités et des corvées liées à l’eau dans nos communautés, et sont donc les plus touchées lorsque l’eau n’est pas considérée comme une priorité ou un droit humain.

S’exprimant sur les efforts de construction de mouvements au Sénégal, au Cameroun et dans le reste de l’Afrique francophone, Fatou Diouf de l’Internationale des Services Publics (ISP)a dénoncé l’accaparement incessant de l’eau dont sont victimes les communautés pauvres de ces pays. Concernant les impacts de la privatisation sur les travailleurs, elle soutient que la privatisation aggrave les conditions des travailleurs et leur capacité à s’organiser collectivement en syndicats.

Racontant, à son tour, les luttes spécifiques de la main-d’œuvre sous le régime actuel de privatisation au Sénégal, Oumar Ba du Syndicat sénégalais des travailleurs de l’eau, a déclaré qu’on ne peut pas prétendre que la privatisation est une solution à la crise de l’eau sur le terrain. Selon Oumar, les travailleurs du secteur de l’eau sont actuellement en grève en raison de plusieurs maux allant de la mauvaise rémunération à des conditions de travail malsaines, en passant par la priorité donnée aux « expatriés » sur les travailleurs autochtones tout en surchargeant ces derniers, entre autres.

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Vickie Urema-Onyekuru, dans sa présentation, a réaffirmé la nécessité pour les États et les pays d’Afrique de résister à la pression et à l’appât de la commercialisation de l’eau. Elle a soutenu que l’eau est la vie et que si l’eau est retirée de l’existence d’un peuple, cela équivaut à lui retirer la vie. Elle a conclu en demandant aux gouvernements africains de donner la priorité aux personnes plutôt qu’aux profits et de prendre en compte les dimensions d’inclusion dans la gouvernance de l’eau. Urema a réitéré que l’état de l’eau après une décennie et deux ans de la résolution 64/292 est loin d’être satisfaisant et a exhorté les États africains à faire davantage. La session a également mis en lumière le projet de loi controversé sur les ressources en eau au Nigeria qui, selon Aderonke Ige, a été condamné par les Nigérians comme étant draconien et impopulaire.

La session s’est terminée par des recommandations spécifiques pour faire avancer l’ensemble de la communauté de la justice de l’eau et des peuples, la plupart des recommandations s’adressant aux gouvernements africains, aux sociétés privées de l’eau, aux organismes régionaux et intergouvernementaux et aux institutions financières internationales.

Parmi les recommandations, les gouvernements africains ont été invités à respecter, protéger et réaliser le droit humain à l’eau pour tous en donnant la priorité à des investissements publics solides, en assurant une participation publique significative dans la gouvernance de l’eau, avec un accent particulier sur les perspectives de ceux qui sont généralement exclus de la prise de décision, comme les femmes, les communautés à faibles revenus et les communautés rurales ; l’intégration du droit humain à l’eau dans les lois et les politiques ; encourager la solidarité et la collaboration régionales en soutenant les partenariats public-public dans le secteur de l’eau et d’autres services essentiels ; intervenir lorsque le droit humain à l’eau est menacé dans leurs États membres par des actions financières et diplomatiques ; cesser de pousser la privatisation, la commercialisation et la financiarisation de l’eau sur les États africains par des services de conseil, des appâts sous forme de prêts et de subventions, ou d’autres programmes, respectivement.

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