Crédits bancaires: les banques camerounaises réduisent leur exposition sur l’État
Banque Atlantique, CCA-Bank, Bicec… Les banques locales semblent plus que jamais décidées à alléger leur portefeuille de prêts vis-à -vis de l'Etat camerounais. Comprendre pourquoi.
Au 31 mai 2023, le volume de crédit mis en place par les banques en faveur des agents économiques est ressorti à 4 925,9 milliards de FCFA en hausse de 14% en glissement annuel selon les données du marché bancaire communiquées par le Comité national économique et financier du Cameroun(CNEF). Cette progression tient du fait que les banques ont nettement renforcé leur exposition sur le secteur privé et les particuliers en augmentant respectivement de 13% et 22% leur concours financier en un an. Cette catégorie de client pèse désormais plus de 75% de l’encours de crédit bancaire dans le pays. Une bonne dynamique qui signifie que les banques soutiennent un peu plus le secteur productif et les ménages.
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Par contre, à la même période, on note une réelle frilosité vis-à-vis du secteur public. Le portefeuille de prêts de l’administration publique centrale auprès des établissements de crédits est notamment passé de 362 milliards de FCFA à fin mai 2022, à 258 milliards FCFA un an plus tard. CCA Bank qui détenait une exposition de 13,7 milliards a allégé son portefeuille de 84% tout comme Banque Atlantique et Bicec dont l’encours de dettes étatique a presque été réduit de moitié passant de 126 milliards à désormais 73 milliards FCFA pour le premier; et de 10 milliards à 5,8 milliards pour le second.
Les raisons de cette baisse ne sont pas évoquées par le CNEF mais on peut estimer que la faible souscription des banques depuis le début de l’année aux opérations d’émissions des titres publics du Cameroun sur le marché de la BEAC y a beaucoup contribué. En effet, le Cameroun et bien d’autres pays de la Cemac éprouvent depuis le début de l’année 2023 des difficultés à mobiliser des financements sur le marché domestique de la dette publique, en raison de la politique monétaire d’austérité mise en place par la banque centrale pour combattre l’inflation.
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En réaction à cela, les banques ont globalement augmenté les coûts d’emprunts mais le Cameroun, fidèle à sa politique d’emprunt à faible taux, refuse parfois de suivre. A fin juin 2023, les taux proposés aux BTA(titres de créance de moins d’un an) du pays ont plus que doublé, passant de 2,68% à 4,67% en l’espace d’un an.
La réduction de l’encours de crédits peut également traduire une volonté des banques de réduire leur exposition sur l’État. Dans son dernier rapport sur le Cameroun, le FMI pointe la « vulnérabilité » du système bancaire camerounais en raison de sa trop forte exposition sur l’État. L’institution relève que l’État représente 35% du total des actifs du secteur bancaire, une proportion qui tutoie les limites du ratio de concentration des risques sur une entité.
Enfin, la réduction du niveau d’exposition des banques sur l’État peut davantage se renforcer au vue de la détérioration de la qualité de crédit du Cameroun. L’agence de notation Standard & Poor’s Global Rating a récemment classé les emprunts en monnaie locale du Cameroun à « CCC+ », premier niveau de la catégorie « extrêmement spéculatif » situé 4 crans au-dessus du défaut de paiement. Il faudra donc scruter les prochaines sorties du pays sur le marché des titres publics de la BEAC pour juger l’appréciation qui a été faite de cette décision par les investisseurs domestiques. Pour l’instant, le gouvernement semble confiant car il utilise un fonds d’amortissement à la BEAC pour le remboursement de sa dette à moyen et à long terme et les banques appliquent une pondération de risque réglementaire nulle à ses titres. Seulement, apprend-on auprès d’un investisseur, « les banques étrangères demandent à leurs filiales en Afrique centrale de ne pas investir sur les titres des États notés en dessous de B- ».
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