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Diplomatie économique: la Chine doublement gagnante en tant que bailleur du Cameroun

La visite au Cameroun d’un représentant du gouvernement chinois a été suivie d’une controverse en rapport à la décision prise par la deuxième économie du monde, d’alléger la dette du Cameroun. La rumeur va désormais bon train et l’opinion se demande si le Cameroun tout entier n’a pas été vendu.

L’actualité camerounaise est marquée depuis le début de la semaine par un nouveau « glissement », celui de la vraie fausse annulation de la dette chinoise due par le Cameroun. S’appuyant sur une affirmation largement partagée sur le réseau social Whatsapp et dont l’origine précise n’a pas encore été tracée, l’information s’est propagée très rapidement. Au sein de l’opinion publique, les pro-gouvernementaux n’ont pas manqué de saluer une victoire forte de la diplomatie de sagesse de Paul Biya, le président de la République. « N’oublions pas que le président de la République a effectué deux voyage en Chine en 2018 et que la Chine s’était engagée à réduire la dette des pays africains à deux conditions. La première, c’est que le pays soit économiquement faible, la deuxième, c’est que le pays fasse montre d’une bonne gestion économique. Cette réduction de dette de 3000 milliards de FCFA est la preuve de la force diplomatique du président Paul Biya et aussi la reconnaissance des efforts de gouvernance économique au Cameroun », a indiqué un professeur de l’institut des relations internationales, dans un débat télévisé sur une des chaînes privées basées Yaoundé. A Douala par contre, l’opinion publique s’inquiète des concessions qui auraient été faites par le gouvernement de Paul Biya pour parvenir à un tel niveau de réduction de dette.


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Des critères précis d’annulation qui semblent n’avoir pas été analysés

Même si les questions que soulève cette réduction de dette sont cohérentes, les différentes analyses se sont appuyées sur des informations erronées. Sur le site de la présidence de la République, le communiqué officiel donnait pourtant des premiers indicateurs sur le type de dettes qui bénéficierait d’une annulation par la partie chinoise. « Le représentant spécial du Chef de l’Etat chinois a annoncé au Chef de l’Etat, l’allégement de la dette sans intérêt du Cameroun envers la Chine à l’échéance fin 2018. L’on se rappelle que lors des entretiens avec le président Xi Jinping à Beijing en septembre dernier, le président Paul Biya avait plaidé pour un allègement de la dette de notre pays envers la Chine. La partie chinoise a donc répondu favorablement à cette demande », peut-on lire dans le document officiel. Cette information indiquait ainsi, qu’il n’est aucunement question d’une annulation, mais d’un allègement, et que cela ne portait pas sur l’ensemble de la dette due par le Cameroun à la Chine, mais à celle n’ayant pas de taux et arrivant à échéance à la fin 2018. Ces deux détails sur les critères de l’annulation de la dette chinoise, ont comme échappé aux analystes du week-end, et il a fallu avoir les éclairages du ministère en charge de l’Economie et du Plan et de l’Aménagement du Territoire, retranscrits par le site d’information « Investir au Cameroun », pour avoir le premier chiffre officiel de l’annulation, qui lui parle de 45 milliards de FCFA. Aujourd’hui, plusieurs questions restent sans réponse. Le chiffre de 3 200 milliards de FCFA est-il à mettre dans l’absolue ? Bien qu’on soit actuellement seulement à 45 milliards de FCFA, l’allègement de la dette s’est-elle faite sans contrepartie ? Telles sont les orientations que prennent désormais les discussions.

cet allègement de dette est un repositionnement du gouvernement chinois, qui souhaite se laver des critiques indiquant que son pays accable ses partenaires africains, d’une dette malsaine

Un encours de prêt effectif de 3200 milliards de FCFA, mais une dette échue beaucoup plus faible

La confusion est venue finalement, semble-t-il, d’une mauvaise manipulation du concept de dette publique. Selon des statistiques officielles sur la dette chinoise en Afrique, le total des prêts et avances obtenus par le Cameroun de son partenaire chinois, atteignait à la fin de l’année 2017, le montant de 5,568 milliards $ (3 216 milliards de FCFA, au cours actuel de la devise américaine). Mais cet encours global des prêts chinois ne donne pas toutes les informations, car il représente le total des crédits obtenus du Cameroun à partir de la Chine. Mais le détail des chiffres renseigne de plusieurs faits. Les premiers prêts chinois d’envergure ont véritablement débuté en 2007, avec une avance reçue de 67 millions $. Le record de prêts reçus par le Cameroun de la Chine date de 2012 lorsque le partenaire du Cameroun lui a remis un total de 1,5 milliard $. En 2015 et 2016, le Cameroun a aussi reçu de volumes importants de prêts chinois avant que le rythme ne tombe drastiquement à seulement 448 millions $. La question d’une réduction de la dette n’a pas été abordée seulement aujourd’hui. En 2002, des responsables chinois et Camerounais avait signé un accord visant à restructurer la dette en cas de besoin. Aussi, cet allègement de dette est un repositionnement du gouvernement chinois, qui souhaite se laver des critiques indiquant que son pays accable ses partenaires africains, d’une dette malsaine. Enfin, sur ce montant global, certaines dettes déjà arrivées à échéance, ont été réglées et d’autres devront l’être dans le futur


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La Chine doublement gagnante dans son statut de bailleur du Cameroun

Un autre argument voudrait que le président Camerounais Paul Biya aurait fait des concessions au chinois. Une des conséquences espérées est la reprise des arrestations de personnalités de la République, ayant commis des actes de détournement. Même si les questions de politique interne peuvent se confondre avec les politiques diplomatiques, une telle hypothèse n’est pas cohérente dans l’absolue. En réalité, le gain chinois a été réalisé en amont. Des chiffres officiels chinois indiquent par exemple, que les revenus des entreprises chinoises attributaires des contrats de construction, n’ont cessé de progresser. En 2016, ces revenus atteignaient un total de 6,8 milliards $, soit près de 1,3 milliard $ de plus que l’ensemble des prêts reçus de ce pays. Ainsi non seulement, la Chine a gagné en contrat pour ses entreprises, mais en plus le Cameroun doit lui verser du cash, pour rembourser les « dettes nés des différents prêts qu’il a reçus de son partenaire, avec pour certains un taux d’intérêt. A cela, il faut ajouter les exonérations discrétionnaires, qui ont permis à des commerçants chinois de prospérer notamment à Douala, la capitale économique, où ils occupent une bonne place dans le commerce du détail. Le Cameroun a reçu plusieurs infrastructures, mais à l’heure actuelle, ceux-ci tardent encore à générer l’impact souhaité sur son économie.

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