Sonara: le gouvernement envisage un plan social
L’entreprise en proie à des difficultés, peine à se remettre de l’incendie qui a consumé ses unités de production dans la nuit du 30 au 31 mai 2019. Alors que la mission de la 4ème revue du FMI en cours en ce moment au ministère des Finances vient d’auditionner le Comité technique de suivi de l’Accord conclu en 2021 avec le Fonds, et la Commission technique de réhabilitation des entreprises relevant du portefeuille de l’Etat sur son cas, l'on s’attendait à des explications et actions concrètes sur le plan de réhabilitation/reconstruction de la raffinerie. Des voix au sein du gouvernement parlent d’un plan de licenciement massif afin d’alléger les concours de l’Etat vis-à-vis de cette société qui engloutit plus de 11 milliards de salaire pour plus de 700 personnels.
Définir le cadre juridique, institutionnel et les modalités de financement du partenariat public/privé à mettre en place dans le cadre de la modernisation de la Société nationale de raffinage (Sonara) ; mobiliser 250 milliards de Fcfa pour rattraper le gap des pertes subies par la raffinerie de 45% à 7%, sont entre autres axes du plan de réhabilitation/reconstruction du raffineur que doit mettre en place le gouvernement pour satisfaire les termes de l’Accord conclu avec le FMI en 2021.
Face à l’inertie observée depuis mai 2022, l’équipe du FMI en séjour au Cameroun dans le cadre de la 4ème revue du programme économique et financier du gouvernement soutenu par la Facilité élargie de crédit et le Mécanisme élargi de crédit, a posé une fois encore le dossier de la raffinerie sur la table le 8 mai 2023. Ce jour-là, les équipes du FMI examinaient le financement de l’activité de la raffinerie en 2022 par l’Etat, la situation des dettes croisées non-bancaires et des dettes croisées du fisc et des autres entités publiques ainsi que la viabilité financière de la Sonara. Selon des sources approchées à cet effet, les explications données à l’équipe du Fonds par la Commission technique de réhabilitation des entreprises (CTR) et le comité technique de suivi (CTS) n’ont pas été satisfaisantes.
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Bien plus, apprend-on de sources autorisées, la raffinerie qui s’était recyclée à l’importation des produits pétroliers depuis que quatre unités de raffinage ont été entièrement consumées, et trois partiellement touchées sur les treize qu’elle comptait, n’est pas parvenue à importer depuis quelque temps.
Un mécanisme palliatif
Pour que le marché ne souffre pas de cette carence, Gaston Eloundou Essomba le ministre de l’Eau et de l’Energie va mettre en place une stratégie d’appel d’offres en vue de la sélection des traders internationaux pour approvisionner le marché. Suite à cet incendie survenu le 31 mai 2019, le MINEE sélectionne par appel d’offres international, quatre traders pour une période donnée en vue de la fourniture des produits pétroliers au Cameroun, avec comme critère de sélection, un niveau de primes plus compétitif. Avant cet incendie, la Sonara assurait 80% des approvisionnements et les 20% restants étaient soumis aux appels d’offres ouverts aux Marketers et à la Sonara également.
Le gouvernement se réajuste
Le projet de réhabilitation/reconstruction de la raffinerie ayant pris du plomb dans l’aile depuis mai 2022, un courant au sein du gouvernement réfléchit à un plan social pour la raffinerie. «On ne peut pas continuer à payer le personnel devenu improductif ; en plus la société est lourdement endettée au point où aucune banque ne peut lui donner de lettre de crédit ou lui prêter de l’argent », lance une source proche du dossier. Ces partisans de la mise en place d’un plan social sont confortés dans leur action par les exigences du FMI. Notons que l’évocation d’un plan social à la Sonara a été faite pour la première fois en 2021 par la CTR dans son rapport 2019 des entreprises publiques. A l’époque, alors que l’on était à 15 mois d’arrêt de production, la CTR suggérait que «compte tenu de la situation actuelle de la Sonara, marquée par un arrêt de la production (…) et d’une situation de faillite», «l’ajustement des effectifs en fonction des nouvelles activités de la Sonara, en vue de la réduction de ses charges d’exploitation » était plus que jamais de mise.
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Un effectif qui pèse
A l’époque, selon la CTR, les charges de personnels avaient absorbé 2,26% du chiffre d’affaires 2019 qui était de 528,739 milliards de Fcfa, soit 11,949 milliards de Fcfa. Mais l’année d’après, soit en 2020, ce chiffre d’affaires a chuté de 70,8% à 153,98 milliards de FCFA. Une chute consécutive aux difficultés à mobiliser des fonds pour couvrir son programme d’importations, aucune banque ne lui faisant plus confiance au regard de l’exposition du système bancaire dans son ensemble aux dettes de cette entreprise dont l’ardoise constitue une préoccupation de tous les instants. Ce malgré la convention de restructuration de dettes de la société en 2021 pour d’un montant de 284 milliards de Fcfa, la Sonara n’est pas parvenue à se redresser. La restructuration avait pour objectif de lui permettre de mobiliser les fonds auprès des banques à des conditions favorables pour assurer les importations de produits pétroliers. Face à la réticence des banques à lui prêter de l’argent, l’Etat en 2020 et 2021, avait dû recourir aux prêts internationaux notamment auprès de la société internationale islamique de financement de commerce afin de permettre à la raffinerie d’importer les produits pétroliers.
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La CTR dans son rapport d’activités 2021, signalait également que l’un des freins à la rentabilité des entreprises publiques était «l’absence des économies d’échelle et une structure pléthorique de coûts, notamment la masse salariale qui constitue une composante majeure des charges de ces entreprises». La Sonara, selon ses données officielles, comptait 734 personnels en 2019 et des fonds propres négatifs de -167,685 milliards de Fcfa au cours du même exercice. Ils se sont établis à -99,4 milliards de FCFA en 2021 selon le président du conseil d’administration de cette entreprise.
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