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Corruption : Yaoundé à la mode des messes et des colloques

Les soupçons de surfacturations, de détournements et d’entorses à la loi dans le cadre des chantiers de la Can 2019, les pertes de 1302 milliards Fcfa enregistrées par le Trésor publics en 2016, la non application de l’article 66 de la Constitution, etc., semblent pourtant trahir un refus des autorités de combattre cette gangrène.

Corruption. Le sujet est dans l’air du temps. A l’initiative du Réseaux des parlementaires camerounais contre la corruption, Yaoundé a accueilli les 10 et 11 décembre dernier, un colloque international sur la lutte contre ce fléau. Députés et sénateurs venus de 10 pays d’Afrique ont ainsi longuement réfléchi, avec des universitaires de haut vol et des acteurs de la société civile, aux solutions à cette gangrène qui touche tous les secteurs de la société camerounaise. En gros, ces acteurs proposent non seulement qu’il soit donné plus de coudées franches aux institutions en charge de lutter contre la corruption, mais aussi que soit mis sur pied un conseil consultatif de lutte contre cette dernière au niveau sous-régional, en plus de l’impérieuse mise en application de l’article 66 de la Constitution du Cameroun, attendue depuis 22 ans (1996).

Dimanche 08 décembre, c’est la Commission nationale anti-corruption (Conac) qui organisait, toujours à Yaoundé, un culte interreligieux pour, a-t-elle expliqué, impliquer davantage les hommes de Dieu dans ce combat, tant c’est eux qui sont au contact direct des masses – le Cameroun compte plus de 90% des croyants chrétiens et musulmans confondus. Il est à préciser qu’au niveau de l’Union africaine (UA), l’année 2018 a été placée sous le signe de la lutte contre la corruption. Mais à la lumière de l’actualité, notamment les soupçons de surfacturations, des détournements en termes de centaines de milliards Fcfa et autres entorses à la loi autour des chantiers de la Coupe d’Afrique des nations (Can) 2019 dont l’organisation vient d’être retirée au Cameroun, tout porte à croire que les pouvoirs publics africains et ceux du Cameroun en particuliers n’en sont encore qu’au stade des bonnes intentions en ce qui concerne la lutte contre la corruption.

Convention de Maputo

Sinon, comment comprendre qu’en dépit de l’existence d’une pléthore d’institutions chargées de lutter contre celle-ci (Conac, Contrôle supérieur de l’Etat, Agence nationale d’investigations financières, cellules de lutte contre la corruption dans les ministères, etc.), le mal ait à ce point réussi à résister si ce n’est à s’aggraver ? Dans son rapport sur l’état de la corruption au Cameroun en 2016, publié en décembre 2017, la Conac a affirmé que le trésor public avait perdu jusqu’à 1302 milliards Fcfa du fait de la corruption. Ce qui dépasse largement les ¼ du budget de l’Etat du Cameroun de cette année-là ; lequel s’équilibrait en recettes et en dépenses à 4234,7 milliards Fcfa.

Les rapports de 2017 et 2018 ne vont certainement pas déroger à la règle. Ils révéleront à n’en point douter que des gestionnaires continuent de manière grotesque à prendre des libertés avec la fortune publique. Ce qui laisse croire à l’opinion que les mille et une institutions chargées de lutter contre la corruption et qui se marchent sur les pieds, les cultes interreligieux, les colloques internationaux, les campagnes d’affichage des plaques anti-corruption devant les édifices publics, etc., c’est de la poudre aux yeux. Le Cameroun se refuse d’ailleurs depuis à ratifier la convention de Maputo (Angola) sur la lutte contre la corruption, 15 ans après son adoption par l’Union africaine.

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