La masse salariale de la fonction publique inquiète la Présidence de la République
Le traitement des agents de l’Etat augmente plus vite que les recettes fiscales. Le Cameroun ne respecte pas la norme Cemac en la matière. Désormais, le pays ne peut recruter qu’à peine 6000 agents par an, sans marge pour une augmentation des salaires. Pour 2022, le président de la République a prescrit au gouvernement de corriger cette situation.
Maîtrise des effectifs et de la masse salariale ; optimisation de la cartographie des postes de travail et des plans de recrutements ; plafonnement des crédits budgétaires réservés aux recrutements planifiés, retrait systématique du fichier solde de tous les agents suspendus au terme de l’opération Coppe, etc. les instructions du président de la République en matière de gestion du personnel de l’Etat transpirent une préoccupation majeure : “ne pas dépasser le seuil de soutenabilité de la masse salariale dans le budget de l’Etat.”
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Au vu de la persistance des contraintes socio-économiques actuelles et compte tenu du poids des salaires dans le budget de l’Etat qui s’élève à 21,6% dans la Loi de finances 2021 et 38,5% des recettes fiscales, la soutenabilité de la masse salariale demeure l’un des enjeux prioritaires de l’objectif de rationalisation des dépenses publiques. Elle permet d’adresser à la fois la question de la qualité des ressources humaines et des dépenses salariales sous-jacentes, nécessaires pour accompagner la mise en œuvre de la stratégie nationale de développement 2020-2030 (SND30).
Une étude menée par le ministère des Finances en 2017 sur la soutenabilité de la masse salariale au Cameroun, a permis d’établir que le volume des salaires payés entre 2006 et 2017 a connu une progression annuelle de 7,8%, supérieure à la croissance moyenne des recettes fiscales (7,5%) au cours de la période. De même, les dépenses de personnel ont augmenté de 63,5% entre 2010 et 2017, contre une hausse de 60,24% du PIB et seulement 58,76% pour le budget de l’Etat.
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Cette évolution montre que l’indicateur de soutenabilité mesuré par le rapport entre les dépenses salariales et les recettes fiscales mobilisées se dégrade progressivement sur cette période. Le niveau de ratio de soutenabilité évalué au 31 décembre 2020 est de 41% contre 38% en 2017 et 34,7% en 2006 alors que le seuil fixé par la norme Cemac dans le cadre de la surveillance multilatérale est de de 35%.
L’étude aboutit aux résultats suivants : avec l’hypothèse de la croissance annuelle des recettes fiscales de l’ordre de 4,5%, il est possible d’effectuer en moyenne 5948 nouveaux recrutements chaque année, mais sans marge pour l’augmentation des salaires ; avec l’hypothèse d’une croissance des recettes fiscales de 6 % par an, un volume annuel moyen 7208 nouveaux recrutements peut être permis, avec une possibilité d’ajustement salarial au taux maximum global de 8 % sur toute la période. Cette marge d’ajustement pourrait également couvrir de nouvelles mesures catégorielles, tout comme elle pourrait permettre de diminuer le stock de la dette salariale ; avec l’hypothèse d’une croissance des recettes fiscales de 8,3% par an, l’on pourrait envisager une moyenne de 7536 nouveaux recrutements, avec la possibilité d’ajustement salarial au taux maximum global de 22 % sur toute la période.
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Au sein du ministère des Finances, l’on reconnaît que la masse salariale a été un sérieux problème macroéconomique et budgétaire dans le passé puisqu’elle réduit fortement l’enveloppe budgétaire à affecter à d’autres secteurs. Il n’y aura certainement pas de baisse de salaires dans l’immédiat mais il n’est pas exclu que la masse salariale redevienne un problème alors que n’est pas traitée la question capitale du rôle incitatif des rémunérations relatives au sein de l’administration, entre l’administration et les établissements publics ou le secteur privé.