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Flux financiers illicites : le Cameroun perd 100 milliards par an à cause de l’évasion fiscale

Une technique répandue consiste à utiliser les prix de transfert, prix pratiqués dans les transactions au sein d’un groupe, pour transférer les bénéfices d’une société installée dans un pays où la fiscalité est forte vers une autre localisée dans un pays où la fiscalité est avantageuse.

Aussitôt dit, aussitôt fait. Le Cameroun a adhéré, il y a quelques jours, à la réforme de la taxation des entreprises multinationales (EMN). Celle-ci prévoit la mise en place -et l’application effective à partir de 2023- d’un impôt minimum mondial aux taux de “15% au moins” que les pays peuvent valablement prélever sur les bénéfices de ces sociétés pour protéger leur base d’imposition… Le pays agit d’autant plus avec célérité qu’il se voit priver d’importantes ressources chaque année par divers mécanismes peu orthodoxes.

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En effet, si l’on prend que 80% des recettes fiscales annuelles de l’Etat proviennent des multinationales étrangères ; si l’on ajoute que leur agressivité dans la planification fiscale est un fait établi et abondamment documenté; vous avez donc une idée de la menace, bien réelle, qui pèse sur les finances publiques.

Le rapport 2020 de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (Cnuced), le rapport du Groupe de haut niveau sur les flux financiers illicites en provenance d’Afrique et d’autres études menées à l’échelle de l’Afrique évaluent à plus de 80 milliards de dollars les pertes de recettes fiscales annuelles dues à l’évasion fiscale internationale. Le Cameroun qui regorge d’un grand nombre de filiales de grandes multinationales n’échappe pas à cette réalité. Le volume global des flux financiers illicites est évalué à 6% du PIB avec des pertes sur les recettes fiscales estimées annuellement à 100 milliards de FCFA.

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Le phénomène de la fraude et de l’évasion fiscale, quoique frappant également les pays avancés, a des répercussions plus dommageables et dramatiques pour les pays en développement notamment africains dont les ressources fiscales issues d’une activité économique encore embryonnaire sont déjà très faibles.

Paradis fiscaux

Selon Ervice Tchouata, analyste en politiques fiscales au Centre de politique et d’administration fiscale de l’Ocde, une technique répandue consiste à utiliser les prix de transfert, prix pratiqués dans les transactions au sein d’un groupe, pour transférer les bénéfices d’une société installée dans un pays où la fiscalité est forte vers une autre localisée dans un pays où la fiscalité est avantageuse. Concrètement, « une société installée là où la fiscalité est forte va sous-facturer ses prestations ou surfacturer ses achats à sa filiale afin de réduire ses bénéfices et en conséquence sa charge d’imposition. La sous ou surfacturation s’apprécie en comparaison du prix de marché qui aurait prévalu si la transaction avait été facturée à une entreprise tierce. Or, dès lors que ces transactions mettent en jeu des actifs immatériels, les prix de marché sont bien plus difficiles à estimer et les prix de transfert à contrôler ».

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Pour faire face à cette menace, le gouvernement met l’accent au cours de ces dernières années sur le renforcement de la coopération fiscale internationale à travers la densification du réseau de conventions fiscales, aussi bien au niveau bilatéral que multilatéral ; l’adhésion au Forum Mondial sur la transparence et l’échange de renseignement à des fins fiscales ; le recours à l’expertise internationale grâce à l’Initiative Inspecteur des Impôts Sans Frontières de l’Ocde. Dans cette même dynamique, le Cameroun a ratifié l’instrument multilatéral (IML) de l’Ocde en décembre 2020, qui offre des solutions aux insuffisances contenues dans les conventions fiscales bilatérales, notamment en matière de règlement des différends.

Selon les simulations de l’Ocde, les droits d’imposition à réattribuer chaque année aux juridictions de marché portent sur plus de 1000 milliards de dollars de bénéfices. Et, cette manne financière taxée aux taux minimum de 15% devrait générer environ 150 milliards de dollars de recettes fiscales supplémentaires par an, au niveau mondial. C’est dire combien cette réforme sera d’un apport précieux aux États qui doivent mobiliser les recettes fiscales nécessaires pour rétablir leurs budgets et mis à mal par la pandémie de la Covid-19.

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