Port de Kribi: où sont passées les fonds d’indemnisation?
Des gorges chaudes entre les élites politiques, les responsables du port autonome de Kribi, ceux du terminal à conteneurs et les autorités traditionnelles de cette cité balnéaire. La marche de protestation initiée ce 22 août 2018 par les populations des villages Mabi, Batanga et Iyassa, ravive la tension autour de ce dossier non-soldé.
La ville de Kribi a connu une forte poussée de fièvre le 17 août 2018, au quartier Mbeeka, niveau pont sur la Lobe, petit fleuve arrosant cette cité balnéaire. Plusieurs dizaines d’habitants des villages Mabi, Batanga et Iyassa ont érigé des barricades sur l’artère Kribi-Mboro. Munis de pancartes, les protestataires manifestaient leur mécontentement après une sortie médiatique de Philémon Alfred Mendo, le Directeur adjoint du Terminal à conteneurs de Kribi (KCT). Sortie dans laquelle ce dernier indiquait sur les antennes de Cameroon Radio and television (Crtv), le paiement effectué des indemnisations suite aux travaux de construction du port en eaux profondes de Kribi, ainsi que du recrutement des jeunes de la localité dans cette même structure. Indemnisations que les populations jurent n’avoir jamais reçu après 4 ans d’attente. La tension est heureusement retombée après plusieurs interventions dont celle des chefs traditionnels de la localité.
Ces notabilités traditionnelles de la bande côtière Kribi-Campo, réunies le 24 août 2018, ont effectué une mise au point sur la situation causale. 27 chefs traditionnels au total. Sur ce qui est qualifié dans le communiqué final de cette concertation, « d’escalade de revendications » et « d’accusations graves » portées contre Philémon Alfred Mendo, reconnu par ailleurs, « compétent », les chefs traditionnels de la bande côtière Kribi-Campo se désengagent totalement de la marche de protestation du 17 août 2018. En prenant conséquemment fait et cause pour le Dga du Kct : » les propos de ce haut responsable et digne fils de la Région du Sud ont été mal interprétés et repris par une certaine presse, l’indexant comme responsable, et présentant faussement la chefferie traditionnelle comme instigatrice et organisatrice du mouvement d’humeur ». La mise au point dûment signée mentionne clairement, « une amorce de réponses aux revendications dignement et paisiblement portées par le Collectif des Chefs traditionnels de la bande côtière Kribi-Campo », à l’issue de son forum du 22 février 2018. Amorce sur la programmation des indemnisations, le recrutement progressif des jeunes de Kribi par KCT, l’implication du Directeur général du Port autonome de Kribi (PAK) dans le recrutement des jeunes de Kribi par les entreprises concessionnaires.
En dénonçant avec « la dernière énergie » les actes malheureux du pont sur la Lobe, les 27 chefs traditionnels Batanga, Iyassa et Mabi pointent, dans la même mise au point, un doigt accusateur sur « une élite politique en mal de notoriété, aux fins de récupération et de manipulation portant atteinte au vivre-ensemble… ». Ils constatent par ailleurs un dessein malicieux de ladite élite sur « le projet structurant dont est doté la cité balnéaire ». Dans une habile esquive, la mise au point ne donne aucune indication sur la personnalité politique indexée. Après recoupement, il s’agit en effet du Sénateur Grégoire Mba Mba, pourtant également contre la manifestation à en croire ses propos tenus au plus fort de la marche de protestation : » vous pouvez revendiquer vos droits, mais si c’est pour barrer les routes, je ne suis pas d’accord avec vous », réagissait à chaud l’homme politique, le 22 août 2018. Un coup savamment fomenté, semblent insister les Chefs traditionnels de la bande côtière Kribi-Campo. Qui parlent même « d’une organisation machiavélique orchestrée par cette élite », dont on connaît, précisent-ils encore « le peu de considération pour les autorités traditionnelles, et dont le souci aujourd’hui est de redorer son blason ».
Les notabilités traditionnelles Batanga, Iyassa et Mabi rappellent, dans cette sortie, leur attachement à la paix et à l’hospitalité ». Sont de surcroît favorable au développement de la ville de Kribi. Dans le camp du Sénateur Grégoire Mba Mba, c’est encore le mutisme total sur la sortie des chefs traditionnels.