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Événement

Réglementation de changes : miniers et pétroliers font la résistance

L’application de la nouvelle règlementation des changes à ces deux secteurs renvoyée aux calendes grecques.

L’un des dossiers sur lesquels le gouverneur de la Banque des Etats d’Afrique centrale (Beac) Abbas Mahamat Tolli a entamé son mandat à la tête de cette institution est la mise sur pied d’une nouvelle. Cette dernière est l’origine de profondes dissensions entre la Beac, les Etats eux-mêmes, la Commission de la Cemac d’une part et les opérateurs économiques, banques, assureurs, importateurs… d’autre part. Cet instrument fait alors obligation, entre autres, aux entreprises résidentes de la Cemac exerçant dans ces secteurs, comme aux autres entreprises opérant à l’international, de régulariser les comptes en devises qu’elles détiennent en sollicitant de la Beac les autorisations requises, de régulariser toutes opérations (emprunts, remboursements, prêts, investissements directs, investissements de portefeuille, opérations de couverture contre le risque de change, etc.) soumises à déclaration réalisées avant l’entrée en vigueur du règlement, et de communiquer à la Banque Centrale toute information sollicitée.

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Si l’on s’en tient aux résolutions de la réunion du Comité de politique monétaire (CPM) de la Beac du 18 décembre 2019, l’application de cette norme communautaire, devrait être opposable aux acteurs de ces secteurs à partir du 31 décembre de cette année. Cependant les opérateurs pétroliers et miniers une fois de plus viennent d’obtenir un moratoire (soit le quatrième du genre) dans l’application de cette norme communautaire dans ces deux secteurs d’activités. En effet le 5 novembre 2020, dans une décision signée par ses soins, le gouverneur de la Beac indiquait : « le délai de mise en conformité visé à l’article premier de la décision N° 071/GR/2019 du 22 novembre 2019 est prorogé jusqu’au 31 décembre 2021 » précise l’article 1. La mise en conformité ici consiste pour ces entreprises à « régulariser les comptes en devises qu’elles détiennent en sollicitant les autorisations requises à régulariser toutes opérations soumises à déclaration réalisées avant l’entrée en vigueur du Règlement N°02/18/CEMAC/UMAC/CM susvisé et durant cette période dérogatoire (emprunts, remboursements, prêts, investissements directs, investissements de portefeuille, opérations de couverture contre le risque de change, etc.) et à communiquer à la Banque Centrale toute information sollicitée » précise l’article 2.

Cette décision de la Beac n’étant pas anodine, car c’est depuis le passage du gouverneur de la Beac sur les antennes de la Crtv le 28 octobre 2020, que les personnes suivant l’évolution de cette réglementation aux secteurs des hydrocarbures et des mines flairaient déjà le report. « Nos équipes sont en discussion avec ces opérateurs depuis le début de ce mois. S’il y’a nécessité, nous sommes disposés à reconduire ce moratoire de façon à permettre que les discussions aboutissent et à ce moment-là nous verrons mieux dans quelles mesures elles vont également se complaire à cette loi » avait-t-il relevé.

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Lobbying

Arrimer les secteurs des hydrocarbures et des mines à cette réglementation semble alors être une équation pour le moins difficile pour Abbas Mahamat Tolli et tout son gouvernement. Dans son édition 382 du 11 novembre 2020 EcoMatin notait déjà qu’un intense lobbying était mené par le secteur minier auprès des plus hautes autorités publiques de la sous-région. «Le gouverneur de la Beac vient d’être convoqué par un chef d’Etat de la sous-région. Selon nos informations, c’est, entre autres, pour appeler son attention sur certaines questions soulevées dans les plaintes qu’il reçoit des entreprises pétrolières opérant dans son pays. Mais heureusement, tous nos chefs d’Etat sont parfaitement conscients de la nécessité de le soutenir pour l’aboutissement de cette réforme», indiquait une source de EcoMatin.

Selon les informations de EcoMatin, l’«affaire» de la réglementation des changes revient très souvent dans les discussions entre les chefs des missions diplomatiques accrédités dans la Cemac ou leurs représentants et les officiels de la sous-région. L’objectif serait alors de parvenir à un démantèlement de certaines dispositions de cette réglementation, ou à tout le moins, obtenir purement et simplement une réécriture de l’instrument juridique communautaire dans le sens de faire sortir les entreprises des secteurs minier et pétrolier de la liste des assujettis au règlement Cemac portant réglementation des changes dans la sous-région, et de circonvenir ainsi la Banque centrale.

Toutefois, la Beac ne se décourage pas et entend poursuivre avec les opérateurs des mines et des hydrocarbures, le dialogue entamé avec ces derniers depuis l’entrée en vigueur de cette réglementation, pour trouver comme les arrimer à cette réglementation ou tout du moins trouver comment faire pour faire rapatrier la part de devises dont elles n’ont pas besoin pour leurs opérations internationales les plus urgentes.

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Rapatriement des devises : mention honorable pour la Beac

Depuis 2017, la conduite de la politique de change est devenue l’une des six missions essentielles de la Banques des Etats d’Afrique central (Beac), dans ses nouveaux statuts. Les secteurs miniers, des hydrocarbures, ne sont pas les seuls concernés. Y figure aussi le secteur bancaire. Dans le cadre de la réglementation de changes dans le secteur bancaire prévoit que les établissements de crédits sont tenus de rétrocéder à la Banque centrale, par l’entremise de leurs correspondants étrangers, au moins 70% des devises issues de l’ensemble des opérations internationales effectuées de la Cemac vers l’étranger. Il s’agit plus précisément des recettes d’exportations des biens et services, aux emprunts, aux avances en comptes courants, aux revenus, aux dons, aux investissements directs ou de portefeuille et aux transferts sans contrepartie. Les 30% restants sont destinés à couvrir les besoins courants des établissements de crédits.

Depuis, l’entrée en vigueur de la réglementation de changes en zone Cemac, l’on note alors une augmentation des réserves de changes de la sous-région. Au 31 décembre 2019, l’on chiffrait le stock à 6 201 milliards de FCFA, contre 3 277 milliards en 2018. Soit une hausse de 89%. Cette hausse a positivement impacté les réserves de change de la communauté qui se sont établies à 4 348 milliards de FCFA, contre 3 777 milliards un an plus tôt.

Cette tendance haussière s’est davantage accrue au cours du premier semestre 2020. D’après l’institut d’émission commune aux six pays de la Cemac (Cameroun, Gabon, Congo, Tchad république Centrafricaine, Guinée Equatoriale), les rétrocessions des banques se chiffrent à 4 182 milliards de FCFA à la fin juin 2020, soit près du double du montant perçu au cours de la même période en 2019 (2 167 milliards de FCFA). Par ailleurs, ce niveau représente 127% du total des montants rétrocédés en 2018 et 67% du total de 2019. « Ces résultats remarquables sont imputables aux activités de contrôle sur pièce et sur place menées par la Beac depuis le début de l’année 2020 et des sanctions appliqués aux contrevenants » indique la Banque Centrale.

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On peut aussi compter parmi les points qui ont vu leurs chiffres augmenter, le compte d’opérations qui a connu un bond de 32%: entre 2017 et 2018, ce compte est passée de 2 552 milliards de FCFA au 31 décembre 2017 à 3 360 milliards de FCFA en fin 2018. Il affiche, fin juin 2019, à 3 822 milliards de FCFA. Les recettes d’exportation rapatriées sont également au vert. Leur taux de progression se situe à 300%.

Historique

La réglementation de changes entre en vigueur en mars 2019. Elle a été décidée le 23 décembre 2016 à Yaoundé lors d’un sommet des chefs d’Etats et adoptée le 21 décembre 2018 par le Comité ministériel de l’Union monétaire d’Afrique centrale (Umac). Si cette aujourd’hui, cette mesure connaît aujourd’hui un franc succès, il est à relever que la banque centrale s’est heurtée au départ à la frilosité des établissements de crédits. « La nouvelle réglementation des changes, perçue à l’entame de sa mise en œuvre comme une source de détérioration du climat des affaires dans la Cemac apparaît en réalité comme un instrument de consolidation de la position extérieure de la Beac, gage de la disponibilité des devises pour le commerce international » indiquait la Beac.

Trois faits générateurs étaient alors à l’origine de la mise sur pied de la réglementation de changes. Il s’agit du « faible rapatriement des recettes d’exportation, l’inadéquation de la politique monétaire et de la réglementation des changes sous régionale à l’évolution du nouvel environnement et aux engagements internationaux des Etats d’Afrique centrale », apprend-on de la Beac.

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