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Grands projets d’infrastructure : la malédiction de la région du Sud

Il a fallu 9 ans et 6 milliards de FCFA pour achever l’hôtel du comice à Ebolowa ; 7 ans et 3 milliards de plus au lieu de 18 mois pour livrer l’hôpital de référence de Sangmélima ; déjà 5 ans de retard et 10 milliards de dépassement du budget initial pour la centrale hydroélectrique de Mekin qui n’est toujours pas livrée, etc.

Partie d’un capital social initial de 500 millions de FCFA, la société Mekin Hydroelectric Development Corporation (Hydro-Mekin), créée le 18 octobre 2010 par le président de la République, Paul BIYA, fonctionne aujourd’hui avec 7,5 milliards de FCFA. En dehors du capital social qui a été multiplié par 15 en dix ans, l’entreprise reçoit des subventions de l’Etat venant soit du ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire (Minepat), soit du ministère de l’Eau et de l’Energie (Minee). C’est dire que l’Etat, unique actionnaire, est fondée à en attendre le juste retour de son investissement. Même si cela prend les allures d’un vœu pieu.

Lors de sa création, Hydro-Mekin, a reçu pour missions de concevoir, financer, construire et exploiter la centrale hydroélectrique de Mekin et d’autres aménagements sur le bassin du Dja ainsi que la mise en place des équipements et infrastructures associés, liés à leur exploitation. Fruit de la coopération sino-camerounaise, le barrage de Mekin est financé par Eximbank de Chine à hauteur de 85% du coût du projet avec 15% de contrepartie camerounaise.

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Pour la réalisation de ce pour ce projet, une convention de financement a été signée depuis le 07 janvier 2010 entre les deux parties. Un contrat EPC [« projet clé en main », Ndlr], d’un montant de près de 25 milliards FCFA, a été signé avec l’entreprise China National Electric Enginee-ring Co. Ltd chargée d’exécuter les travaux depuis le 25 octobre 2010. Il est question de construire un barrage avec une usine de pied d’une puissance de 15 MW et d’une ligne d’évacuation d’énergie de 33 Km le long de Mékin, au lieu-dit Ndjom Yekombo, station d’interconnexion au Réseau d’interconnexion Sud (RIS).

C’est donc à juste titre que dans son discours d’ouverture du comice agro-pastoral d’Ebolowa, le 17 janvier 2011, Paul Biya annonce : « J’ai aussi décidé de faire démarrer le plus tôt possible les travaux de construction d’un certain nombre d’ouvrages. Il s’agit notamment, vous le savez (…) du barrage hydroélectrique de Mekin ». Selon la documentation officielle, les travaux sont prévus pour 36 mois à compter de fin février 2012. Cette infrastructure est alors le premier projet et « priorité » dans le portefeuille de Hydro-Mekin. Huit ans plus tard, le chantier n’est toujours pas livré.

Gouffre à sous

Résultat : le barrage qui devait permettre la sécurisation de la partie australe du RIS dans le cadre d’un fonctionnement de la centrale en réseau interconnecté d’une part, et en réseau séparé d’autre part permettant d’alimenter prioritairement l’ensemble des huit communes du département du Dja et Lobo ne produit pas encore les effets escomptés. L’entreprise prend les allures d’un gouffre à sous.

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Barrage de Memve’ele : la mise en service complète annoncée pour fin 2020

Lors de son passage devant la commission des finances et du budget de l’Assemblée nationale, le ministre de l’Eau et de l’Energie (Minee) Gaston Eloundou Essomba, avait été péremptoire en annonçant la mise en service définitive du barrage hydroélectrique de Memve’ele prévue pour le 31 décembre 2020. Soit 8 ans après la pose de la première pierre par le président de la République. Les travaux de construction de la ligne de transport d’électricité entre Nyabizan, localité qui abrite le barrage de Memve’ele et Yaoundé (longue de 350KM) ont été ralentis il y a quelques temps de cela. Et pour cause, les populations de Nsimalen s’étaient opposées à la construction de pylônes dans la localité Nkolzock. Ces dernières réclamaient leurs indemnisations attendues depuis 7 ans. A la suite de la descente du Directeur général d’Electricity Development Corporation (EDC), Théodrore Nsangou, sur les lieux, le 31 août aura contribué à faire revenir le calme sur ce chantier.

Le barrage de Memve’ele est inscrit au titre des grands projets du Document de la stratégie de croissance et l’emploi (Dsce). Adopté en mai 2009 ce document est le cadre de référence de l’action gouvernementale pour la période 2010-2019. Les travaux de construction de ce projet structurant ont démarré le 15 juin 2012. Selon les prévisions, ce chantier devait initialement s’achever en 2017. « Le chronogramme indique que les travaux démarreront immédiatement après cette cérémonie et la mise en service de l’aménagement interviendra dans 54 mois, c’est-à-dire en début 2017. Il est à noter que les premières turbines seront opérationnelles au bout de 36 mois », s’exprimait ainsi Basile Atangana Kouna, ministre de l’Eau et de l’Energie (Minee) de l’époque.

Mais jusqu’à l’heure actuelle, ce n’est toujours pas le cas. Seul le barrage est terminé. Sa mise sous tension n’est intervenue que le 16 avril 2019, avec une première injection de 80MW, inférieur à la puissance réelle du barrage, soit 211MW. Toujours dans le cadre de ce barrage la ligne de transport électrique, quant à-elle est toujours et figure comme cause principale du retard de la livraison totale du projet. Le barrage de Memve’ele est construit sur le fleuve Ntem dans la région du Sud. Les travaux de construction étant assurés par l’entreprise chinoise Sinohydro pour un coût de 365 milliards. Notons que pour l’achèvement de ces travaux, un budget en plus de 9,5 milliards de FCFA lui a été alloué. A cela s’ajoute le fait que l’aménagement du barrage de Memve’ele est cité selon la Banque mondiale comme l’un des projets camerounais, dont les coûts sont deux à trois fois supérieurs à ceux réalisés dans les pays ayant le même niveau de développement que le Cameroun.

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Hôpital de Sangmélima : la référence hors délai

« L’hôpital de référence de Sangmélima sera livré cette année » ainsi parlait Paul Biya le 17 janvier 2011 à l’occasion de la cérémonie d’ouverture du comice agropastoral d’Ebolowa. Par ses propos, le président de la république prenait ainsi un engagement formel auprès des camerounais, mais aussi et surtout auprès des populations de la région du Sud, vis à vis de cette infrastructure qui avait de la peine à sortir de terre.

L’engagement du chef de l’Etat visait surtout à apaiser les cœurs des populations qui avaient bien l’impression d’avoir été tournées en bourrique. En effet, c’est en date du 13 décembre 2007 que le ministre de la santé publique de l’époque André Mama Fouda procédait à la pose de la première pierre de ce qui devait être un hôpital de référence. « Cette structure est la première du genre d’une série de sept autres qui devront être construites, dans les autres chefs-lieux de région autres que Yaoundé et Douala. C’est ce qui est prescrit par le Plan d’urgence triennal qui prévoit également la réhabilitation et le rééquipement des hôpitaux généraux de Douala et Yaoundé, ainsi que du Centre hospitalier universitaire de Yaoundé » indiquait le Minsanté.

Pour l’hôpital de référence de Sangmélima, la durée d’exécution des travaux était de 18 mois. Deux ans après, les travaux ne seront pas livrés ; pis encore, l’entreprise chargée de la construction décide en avril 2010 d’arrêter les travaux. « Suivant les rapports que nous avons reçus, le projet connaissait certaines difficultés depuis le mois d’avril 2010. Des blocages dus notamment à l’appréciation des travaux supplémentaires et confortatifs » indiquait alors André Mama Fouda descendu sur les lieux pour s’enquérir de la situation au mois d’octobre de la même année.

Après d’intenses négociations l’entreprise consentira à reprendre les travaux, mais sous la base d’un nouveau chronogramme qui sera donné aux hommes et femmes de médias. En vertu du nouveau chronogramme, la première phase des travaux devait être livrée en mai 2011 et l’ensemble des travaux, à la fin de la même année. Jusqu’ici, le coût restera le même (12 milliards de FCFA).

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Serpent de mer

Alors que l’année 2011 tirait à sa fin, les populations du Dja et Lobo commençaient à s’interroger sur le respect des nouveaux délais ; visiblement l’infrastructure accusait de nombreux retard dans l’exécution. Des interrogations qui aboutirent sur l’idée d’avoir une fois de plus été trompé. C’est finalement le 23 juillet 2015 que le premier ministre chef du gouvernement de l’époque, en la personne de Philemon Yang procéda à l’inauguration officielle, soit 7 ans après le démarrage des travaux.

Pendant sept années, la construction de l’infrastructure a été torpillée. L’on a assisté à la fragmentation des travaux, dans les procédures de passation des marchés. Le comité de pilotage, pourtant bien garni, a failli plusieurs fois, voler en lambeaux. « Il y avait des manquements énormes du concepteur. On ne pouvait pas avancer sans combler ces lacunes et manquements. Il y a eu aussi que le même concepteur, « Comète International », une entreprise tunisienne, a eu la maîtrise d’œuvre. Il avait du mal à accepter ces manquements. Il fallait que le ministre s’implique un peu plus pour analyser, vérifier et arbitrer. « Il nous a donné raison, parce que tel que c’était conçu, cette institution sanitaire ne remplissait pas les normes d’un hôpital de référence digne de ce nom. Il a fallu beaucoup de temps, des négociations parfois houleuses et surtout une dérogation spéciale du premier ministre pour dépasser le plafond des avenants. Nous sommes convaincus que les manquements ont été justifiés » justifie Mvogo Saint Fabien, porte-parole et mandataire du groupement des entreprises déployés sur le chantier.

Outre les délais, se pose la question du coût. Sur les 12milliards annoncés plus haut, l’on apprendra finalement de sources autorisées que c’est 15 milliards de F CFA.

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Potentiel sous-exploité

Le Centre hospitalier régional d’Ebolowa, à sa livraison affichait un visage plutôt reluisant en termes d’infrastructure et d’équipement. A terme, l’ambition de l’ouvrage était, au-delà des services reconnus à tout hôpital, de construire 12 pavillons présidentiels, une douzaine de résidences de fonction, et un héliport. Etalé sur près de 12 hectares, le projet bien qu’inachevé dévoile déjà ses allures d’hôpital de référence à caractère sous régional.

Seulement aujourd’hui, l’hôpital affiche une sous-exploitation de son potentiel. Résultat des courses plusieurs de ces équipements sont hors-service. La vétusté de certains équipements du plateau technique, les effectifs insuffisants, des délestages réguliers, la faible fréquentation et lourd processus financier sont quelques problèmes auxquels fait face cette formation sanitaire.

Hôtel Bengo d’Ebolowa : l’autre gouffre à sous du comice

Le 30 janvier dernier, c’est en grande pompe que le premier ministre chef du gouvernement Joseph Dion Ngute procédait à l’inauguration, dans la ville d’Ebolowa, de l’hôtel Bengo, communément appelé « Hôtel du comice ». Bâti sur un investissement de 15 milliards, l’infrastructure est construite sur plus de 2400 m2 composé de 92 chambres, restaurants, salles de conférences etc. Cet édifice à l’allure imposante qui est situé à l’entrée de la ville d’Ebolowa traîne néanmoins avec lui son lot de casseroles. En effet, c’est en 2011 que le projet avait été lancé en prélude à l’organisation du comice agropastoral d’Ebolowa, mais avait rencontré d’énormes difficultés de financement. Résultat des courses, c’est seulement 9 ans après qu’il sera opérationnel.

Il n y’a pas que les délais qui ont été rallongés ; les coûts aussi n’y ont pas échappé. Et pour cause, des ajustements en cours d’exécution qui témoignaient tout simplement de l’immaturité du projet. Tout d’abord, en cours d’exécution, le standing de l’hôtel connaîtra une modification, passant de 03 étoiles à 04 étoiles pour un coût de 9 milliards de FCFA. Mais le premier couac viendra de l’entreprise chinoise Zhong Bao, adjudicataire du marché, qui ne fera pas mieux que le lancement des travaux. Mieux les responsables vendront au noir tout le matériel déjà disponible pour le début des travaux: barres de fer à béton, sacs de ciment et d’outils, un matériel qui était lui-même livré à crédit. Si pour un début le projet a connu des difficultés de financements, c’est à cause d’une cacophonie gouvernementale au sujet de la provenance des fonds, initialement adossé sur le budget du Comice (40 Milliards). Si cela n’a pas été possible, l’on se rejetait la patate chaude entre le ministère de l’Agriculture, celui du Tourisme et la SNI.

C’est finalement en 2013 que les travaux seront confiés à une autre entreprise, il s’agit de Top international Engenering corporation (Tieg). Sept ans plus tard, c’est un immeuble R+6 qui sortît du sol pour un coût de 15 milliards de FCFA, soit 6 milliards de plus que le coût initial.

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Route Ebolowa-Akom II-Kribi: une promesse de génération en génération

Pour les plus jeunes, l’annonce fait partie de la litanie du président de la République, le 17 janvier 2011, à l’ouverture du comice agropastoral d’Ebolowa. « Le développement du monde rural suppose le désenclavement des bassins de production agricole (…) Aussi ai-je décidé la réalisation des routes bitumées (…) Eblowa-Kribi par Akom II », avait lancé Paul Biya, tout souriant. Pour les plus âgés, l’annonce de janvier 2011 n’est qu’un rappel puisque l’annonce du bitumage de la route Ebolowa Kribi ne date plutôt de 1991 à l’ occasion de la visite du Chef de l’État Paul Biya à Ebolowa.

Qu’il s’agisse de 2011 ou de 1991, les populations riveraines n’ont toujours pas vu la moindre couche de bitume. L’attente continue donc. Or, en 2011, le président parlait de ce projet comme une des « réponses urgentes et appropriées» au désenclavement des bassins de production des produits de base. « Et vous savez bien, ici dans la région du Sud, ce qu’enclavement veut dire», ironisa-t-il. Mais pour l’heure, il faut encore braver les nombreuses déformations de la chaussée communément appelées « nids-de-poule» et les bourbiers pour rallier la cité portuaire de Kribi, en partant du chef-lieu de la région du Sud, Ebolowa, en passant par la petite bourgade d’Akom 2.

Des sources proches du groupe italien ICM construction limited, chargé de la construction de cette route de 179 Km, le financement de 128,3 milliards de FCFA est déjà disponible, même pour les indemnisations des populations qui seront impactées par les travaux. Le 8 octobre 2020 le ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire a abrité une réunion sur la mise en œuvre du financement de ce projet. Selon l’évolution des procédures administratives, le début des travaux est projeté en janvier 2021 pour une durée de 36 mois, indique-t-on.

Pour ce qui est des travaux proprement dits, ils s’effectueront simultanément sur deux tronçons : Ebolowa-Akom II (81,6 Km) et Akom2- Kribi (80 Km). Outre le bitumage, 17 ouvrages d’art, trois stations de pesage et deux stations de péage seront construits le long de cette route. Par ailleurs, la ville d’Ebolowa bénéficiera d’une voie de contournement de 1, 38 kilomètre et la cité d’Akom II sera reliée à cet axe par une bretelle de 4 kilomètres.

Début août 2020, l’entreprise italienne a tenu à Ebolowa, une réunion de clarification sur l’environnement du projet, évoquant la pandémie du coronavirus et la saison des pluies parmi les causes du retard dans le démarrage des travaux. Actuellement, l’entreprise se consacre au « maintien de la circulation » et s’échine à expliquer aux populations que maintenir la circulation (curer et de maintenir les zones critiques) est une chose, construire la route en est une autre. Ainsi, la section Ebolowa à Akom II est achevée suivant les exigences du ministère des Travaux publics.

Une fois achevée, cette route va desservir le port en eau profonde de Kribi et facilitera la circulation des biens et services en matière d’importation et d’exportation dans la sous-région.

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Complexe industrialo-portuaire de Kribi: les 4 composantes intégrées à la traîne

Voici ce que prévoyait le gigantesque projet du Complexe industrialo-portuaire de Kribi (Cipk): la construction du port en eau profonde de Kribi, une ville nouvelle, un corridor multimodal, des zones logistiques et industrielles et autres opportunités d’affaires. Lancé officiellement en 2011 par le Président de la République, le chantier proprement dit a débuté en 2010 par les terrassements généraux, ce chantier présenté comme «projet majeur des grandes réalisations», accuse malheureusement un grand retard sur ses différentes composantes intégrées.

Le «Port en eau profonde de Kribi» demeure la composante du projet qui affiche un taux d’avancement moins catastrophique. La réception provisoire de sa phase 1 s’est effectuée en mars 2015, et en 2016, sa réception définitive. Puis interviendra le 2 mars 2018, sa mise en exploitation. A ce jour, bien qu’accueillant par saccade des navires, la phase 2 du port de Kribi se poursuit malgré les délais largement dépassé.

Lancé en novembre 2017, puis interrompus en novembre 2018, le vaste chantier a redémarré en février 2020. Les responsables du port autonome de Kribi annoncent la fin de la 2ème phase en 2023. Les travaux à réaliser dans cette phase portent essentiellement sur l’aménagement d’un second terminal à conteneurs de 750 mètres, le prolongement du mur de quai de 715 mètres, le rallongement de la digue de protection de 675 mètres, et l’aménagement de chaussée portuaire d’une superficie de 37 hectares. Le port général de Kribi s’étend sur les sites de Mboro, localité située à 30 kilomètres au sud de Kribi, et sur le site de Lolabé à 4 kilomètres de Mboro.

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Le «Corridor multimodal» du complexe industrialo-portuaire de Kribi consiste en la réalisation d’un back-bone de 400 à 500 mètres de largeur, d’Edéa, dans le département de la Sanaga maritime au port de Kribi, dans le département de l’Océan. Il inclut toutes les dessertes du complexe (ferroviaire, auto routière, transport d’énergie, fibre optique). Rendu à octobre 2020, les travaux du corridor multimodal annoncé sont encore malheureusement à la traine. Principal point d’ancrage de ce corridor capital, l’autoroute Kribi-Lolabé, d’une longueur totale 38,5 kilomètres de chaussée, se compose par ailleurs de 3 échangeurs, et 10 ponts pour un coût de 250 milliards de FCFA. Prévu pour un délai de 42 mois, à partir du 1er janvier 2015, les travaux devaient s’achever juin 2018.

Quant à «la Ville nouvelle», elle se met progressivement en œuvre. Prévus dans cette composante, l’aménagement d’une nouvelle cité sur 4000 hectares. Les prévisions tablent sur une localisation de 80.000 à 100.000 habitants à l’horizon 2035. Les études pour la réalisation de la phase 1 de 2100 hectares, le plan de secteur et l’avant-projet détaillé sont d’ores et déjà disponibles, apprend-on au port autonome de Kribi. C’est le 12 janvier 2011 que l’Etat du Cameroun et la banque chinoise Eximbank signent une convention de financement d’un montant de 207 milliards de FCFA pour la réalisation des travaux du projet sur la base d’un contrat engineering procurment and constructing. Le 8 avril 2011, surviendra l’adoption du schéma directeur du projet par le gouvernement camerounais, puis l’arrivée du premier matériel de la société China Harbour engeneering Company Ltd. (Chec), marquant le lancement officiel des travaux.

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Pour justifier le retard pris sur les différentes composantes, le gouvernement camerounais et le port autonome de Kribi évoquent plusieurs raisons, parfois divergentes: la mobilisation laborieuse des ressources financières, les aléas d’importation du matériels, les problèmes de déguerpissement des populations etc….Sous cape, on évoque des tensions interministérielles dans la gestion de ce juteux projet, des grèves sur les chantiers, ou encore les lenteurs administratives.

Agence Beac-Ebolowa : 13 ans après, la maquette…

Le Premier ministre chef du gouvernement Joseph Dion Ngute a procédé, le 29 septembre 2020, à la pose de la première pierre de l’agence régionale Beac-Ebolowa, dans la région du Sud. Annoncée depuis 2007, il faudra encore attendre 2 ans pour voir s’érigée cette infrastructure qui sera construite sur une superficie de 8 312m2.

L’agence Beac-Ebolowa, vient ainsi rejoindre les 6 autres agences Beac du pays que sont Yaoundé, Douala, Bafoussam, Garoua, Limbé et Nkongsamba. Cette dernière qui a pour particularité d’être située sur des axes qui mènent vers trois pays membres de la Cemac que sont la Guinée Equatoriale, le Congo-Brazzaville et le Gabon, permettra d’encadrer les activités des établissements bancaires et des microfinances opérant dans la région du Sud, de booster l’économie régionale et sous régionale réelle et participer à l’aménagement du territoire. Voilà près de 13 ans que ce chantier est attendu dans la région du Sud. Plusieurs raisons pourraient justifier qu’il ait mis autant de temps. Notamment les querelles politiques et tribales. A l’annonce de la construction de la Beac-Ebolowa, les élites de cette région, en particulier celles qui assument de hautes responsabilités au sein de la Beac avaient manifesté des velléités d’en faire une récupération politique. Car la région du Sud, étant la région native du chef de l’Etat est depuis 10 ans l’objet d’un flux massif d’investissements publics : routes, barrages…pour améliorer les conditions de vie des populations mais aussi de faire d’elle l’un des centres névralgiques du système économique national.

Rallongement des délais

Le fait marquant autour de ce chantier c’est la durée liée à l’attribution du marché. Alors que l’appel d’offres avait été lancé le 18 juillet 2018, ce n’est qu’en Juin dernier que l’entreprise African Corporation Tchad (Afcorp) a pu engager pleinement les travaux.

Dans un article publié au mois d’avril dernier, EcoMatin, faisait savoir qu’au mois de février 2020 Amadou Ahmadou Directeur général de DNB International Sarl, une entreprise camerounaise spécialisée dans les prestations de services, le commerce général, les travaux publics et les bâtiments, écrivait au président de la République du Cameroun pour dénoncer les conditions d’attribution du marché de construction de l’agence Beac-Ebolowa à la société Afcorp, détenu par le frère aîné du chef de l’Etat Tchadien et proche du président de la Beac.

Ont suivi par la suite des tractations qui, sans le dire ont contribué pour beaucoup à ralentir les travaux de construction de cette infrastructure.

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Région du Sud : la malédiction des ressources

On doit à la vérité de l’écrire : les insuffisances dans la conduite des projets d’infrastructure relevées dans la région du Sud sont loin de lui être propres. Ils s’actualisent sur l’ensemble du territoire national, et ont pour ressorts plusieurs déterminants de portée nationale :«faible qualité des études de faisabilité, mécanismes non opératoires de passation des marchés, non articulation entre le projet et ses infrastructures connexes, insuffisante coordination des acteurs, retards des paiements des indemnisations, faible sous-traitance locale, multiplication des unités opérationnelles, affichage budgétaire insuffisant des grands projets par les maîtres d’ouvrage, circuit inefficace de la mobilisation des liquidités, trop grand nombre de projets» reconnaissait le gouvernement lui-même dans l’annexe de la Loi des Finances 2020 relative à l’évolution des grands projets d’investissement.

Et ce constat n’est pas nouveau. «Parmi les rigidités structurelles identifiées comme risque pour la mise en œuvre du Dsrp (Document de Stratégie pour la réduction de la pauvreté, ndlr) figurait en bonne place la persévérance des problèmes d’absorption des ressources extérieures. Ces problèmes ont effectivement prospéré, sans que l’absorption des ressources internes d’investissement, aussi bien les ressources internes ordinaires que celles issues de la dette, ne connaissent pas une amélioration notable.

Le risque induit par cette faiblesse demeure effectif, car elle plombe de fait le niveau de l’investissement avec des conséquences sur la croissance et la réduction de la pauvreté», écrivait déjà le gouvernement en 2009 dans le Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi (Dsce).

En septembre 2019, le Centre d’Analyses et de Recherche sur les politiques économiques et sociales (Camercap-Parc), pointait quant à lui, dans son rapport sur «l’(in)efficacité de la programmation budgétaire au Cameroun, l’inefficience de la gestion budgétaire. «Inadaptabilité du modèle conceptuel de la programmation des dépenses publiques au Cameroun, et qui engendre entre autres, déficit d’évaluation de la performance de l’administration publique ; inadaptation du Code des marchés publics aux fins d’émergence, manque de coordination entre les institutions chargées du contrôle et du suivi des Finances publiques, déficit de compétences et capacités locales en identification, maturation, programmation, suivi et évaluation des Projets d’Investissement publics», entre autres.

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Neutralisation

Un contexte national contraignant donc, mais guère capable, à lui seul d’expliquer autant de contre-performances. La région du Sud charrie en effet de puissants facteurs locaux, cette fameuse «couleur locale», qui exerce, sur la conduite de ces projets, un déterminisme lourd : sa riche dotation en élites nationales. «Vous y avez une élite nationale au km2, et j’exagère à peine. Cela est une bonne chose pour notre région qui dispose ainsi, en toute théorie, d’autant d’opportunités de capter et de «domicilier» un grand nombre de projets nationaux», commence un haut cadre de l’administration originaire de cette région. Qui poursuit : «Mais chaque médaille ayant son revers, cette riche dotation en forces vives nationales entraîne aussi, comme contrainte, la nécessité absolue, pour toutes ces élites, de se coordonner harmonieusement pour la réalisation des grands projets.

Il s’agit certes de projets nationaux, conduits par l’Etat. Mais ils doivent, pour être menés à bon port, bénéficier de l’adhésion totale ou en tout cas massive des populations à la base et des élites locales. Et c’est cela le plus dure dans notre région. Il faudrait que toutes les élites soient motivées par l’intérêt général, ce qui est loin d’être le cas. Et même dans ce cas, il faudrait encore toutes les coordonner. Sinon, vous avez des guerres de leadership, de représentation, d’égos, de compétences, de légitimité, d’influence…entre ces élites, qui finissent par se neutraliser, et neutraliser le développement de beaucoup de projets».

La malédiction des ressources, en somme…

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