Centres de gestion agréés : une mine d’or sous-exploitée
Depuis dix ans, les centres de gestion agréés (CGA) fournissent un accompagnement administratif, fiscal et comptable aux PME. Même si les avantages pour les structures restent prouvés, les CGA peinent encore à séduire auprès des acteurs concernés.
La ville d’Ebolowa a abrité du 11 au 13 août dernier la 5e édition des caravanes de sensibilisation pour l’adhésion des PME aux Centres de gestion agréés sur le thème : « Les CGA, instruments d’appui à la formalisation et à la compétitivité des Pme maillons essentiels pour une relance économique vigoureuse et inclusive ». Cet événement annuel vise à rapprocher les entrepreneurs et chefs d’entreprises de ces structures d’encadrement et d’accompagnement de l’activité des PME. C’est dans cette logique que le ministre Achille Bassilekin III s’était rendu à Maroua le 27 juin 2019, dans le cadre de ces caravanes. Des promoteurs de start-up, coopératives ont pu en apprendre davantage sur les centres de gestion agréés.
Dans le pays, l’évènement organisé par le ministère des Petites et moyennes entreprises, de l’Economie sociale et de l’artisanat (Minpmeesa) constitue le principal moyen de promotion de ces associations consacrées dans la loi de finances de 1997 et organisé à la faveur d’un décret du Premier ministre le 06 janvier 2000. Mis à part cette campagne de portée nationale, les autres mécanismes de séduction demeurent dans les entretiens directs avec les entrepreneurs au ministère et la documentation qui y est distribuée.
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« Nous n’adhérons à aucun centre de gestion agréé pour la simple raison que nous n’avons jamais vu aucun représentant ici. Je ne sais pas où ils se trouvent », indique Gérôme, responsable d’un établissement commercial au marché central de Yaoundé.
Les insuffisances de communication et d’information sur les bienfaits d’une adhésion à des CGA se répercutent sur l’engagement des structures. Selon la Direction générale des impôts, 6 614 entreprises étaient inscrites dans des CGA en 2019. Un nombre qui est de loin inférieur aux 209 482 unités économiques recensés dans le pays par l’Institut national de la statistique (INS) en 2016. Selon les résultats du deuxième recensement général des entreprises de l’INS, le tissu économique est porté à (79,1%) par les très petites entreprises, (19,4%) par les petites entreprises, (1,3%) par les moyennes entreprises et (0,2%) par les grandes entreprises.
« Mon patron n’adhère à aucun centre. Nous en avions parlé à mon arrivée dans la structure il y a un an et demi. Je lui proposais qu’on aille se renseigner auprès d’un CGA mais il n’a pas semblé intéressé donc on gère nos affaires nous-même », confie Sylvie T, responsable d’un cabinet d’optique médical.
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Des avantages réels pour les entreprises
Les avantages d’adhérer à des centres de gestion agréés ne sont pourtant plus à démontrer. Ces derniers fournissent à leurs membres une assistance comptable permanente à travers un appui technique dans la tenue de leur comptabilité et la production de leurs états financiers dans les formes requises par la législation. Ils offrent une assistance dans la production des déclarations fiscales lors de contrôles, de recouvrement de contentieux fiscaux et dans la gestion administrative. Les CGA accompagnent également leurs membres dans toutes les démarches administratives nécessaires à leurs exercice, assurent également l’information et la formation de ses adhérents. Pour remplir ses missions, tout CGA est accompagné dans ses exercices par un inspecteur d’impôts désigné par le ministre des Finances.
Le traitement des déclarations fiscales par l’entremise des CGA apporte des effets positifs pour les entreprises qui jouissent alors d’un abattement de 50% sur le bénéfice fiscal déclaré. Elles bénéficient aussi d’une exonération de patente pour leurs deux premières années d’exercice. Les entreprises brassicoles adhérant à des CGA ont le privilège d’une rétrocession de 50% des retenues de précomptes sur achats opérés auprès des grandes entreprises du secteur.
« Ca fait plus de quatre mois que j’adhère à un centre de gestion. Je bénéficie des avantages fiscaux que cela m’apporte, je paye moins d’impôt, si j’ai un problème le centre intervient pour résoudre le problème », indique Joseph T, promoteur d’un débit de boisson.
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Responsabilité partagée
Du côté des CGA, l’on pointe un doigt accusateur sur les ministères des Finances et des Pme, jugés trop présents, pour expliquer le peu d’engagement des opérateurs économiques. « La création des centres de gestion agréés a été bousculé dans le cadre du dialogue public-privé dans le cadre du Cameroon business forum lorsque les entrepreneurs s’étaient plaints des tracasseries de l’administration fiscale. On s’est donc rappeler que dans la loi de finances de 1996/1997 on avait prévu un dispositif comme ça qui devait être mis en œuvre. Sauf que dans le cadre de l’opérationnalisation, le ministère des Finances et le ministère des Pme se sont accaparés de l’affaire et tout ça a rendu les opérateurs économiques frileux. Lorsque le secteur privé parlait de la résolution des tracasseries fiscales, l’administration fiscale dans son implantation a plutôt tourné la création des centres de gestion agréés dans le but de lutter contre l’informel », explique Hippolyte Nkono, chef du CGA à la Chambre du commerce. Pour lui, pas de doute, les CGA continuent de jouer leur rôle, même dans un contexte difficile.
« Nous intervenons exactement comme des cabinets. C’est comme si c’était trois cabinets réunis, un cabinet de conseil fiscal, un cabinet de ressources humaine/formation et un cabinet comptable. Lorsque vous avez rencontrez des problèmes fiscaux, le conseil fiscal se lève et va rencontrer l’administration. Lorsque vous êtes membre d’un CGA, votre centre des impôts sait déjà à quel CGA vous appartenez, du coup vous n’avez plus de tracasserie parce que le centre d’impôts sait déjà qui est son interlocuteur. Cela laisse du coup plus de temps libre à l’entrepreneur de se concentrer sur son entreprise et de faire grandir son activité », souligne Hyppolyte Nkono.
L’inscription à des centres de gestion agréés est ouverte à des structures dont le chiffre d’affaires est compris entre 0 et 100 millions de FCFA, moyennant des frais de 25 000 Francs CFA à 50 000 Francs CFA et des cotisations annuelles comprises entre 50 000 Francs CFA et 250 000 Francs CFA. Des services supplémentaires sont accordés aux entreprises qui bénéficient de facilités d’accès au financement, les CGA permettant de leur assurer une crédibilité auprès des institutions bancaires et financières. A côté de cela, les porteurs de projets bénéficient de formation sur les formalités de création d’entreprises, en conseil et ingénierie financières, entre autres.
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