Consommation : Flambée des prix dans les marchés
L’avènement de la Covid-19 annonçait des périodes difficiles, particulièrement du point de vue économique. Une situation aggravée par la durée de la crise. Même si la situation n’est pas alarmante, elle préoccupe néanmoins. Surtout au regard de l’évolution des prix de certaines denrées sur le marché. Le riz, le maïs, le poisson, l’arachide et les haricots désormais plus chers.
Interrogé sur la disponibilité des produits alimentaires malgré l’apparition de la pandémie à coronavirus au Cameroun, le ministre du commerce (Mincommerce), Luc Magloire Mbarga Atangana, s’est voulu plutôt rassurant au sortir d’une réunion de concertation avec les acteurs de la grande distribution et de l’import-export, le 12 mars 2020. Se basant sur les chiffres de la douane camerounaise, le ministre affirmait alors qu’à la fin du premier trimestre 2020, soit le 03 mars, le Cameroun avait importé plus de 100 000 tonnes de riz. Le ministre a soutenu que cette quantité était un indicateur de la capacité du pays à faire face à la pandémie. En ce qui concerne cette denrée, le pays disposait donc d’un stock suffisant.
En effet, un tour dans les différents marchés de Yaoundé permet de constater que le riz est bien disponible sur les étals. Mais force est de constater que le prix de cette denrée très prisée par les ménagères ne cesse d’évoluer. A titre d’exemple, le sac de cinquante kilogrammes de riz « 5% de brisures » coûtait alors entre17 500 FCFA et 18 500 FCFA. Aujourd’hui, il coûte entre 25 500 FCFA et 26 000 FCFA. Cette flambée est un indicateur que tout n’est pas aussi normal que le ministre l’a prédit. Entre soupçons de spéculation orchestrée par des opérateurs véreux qui veulent maximiser le profit et risque de rupture des stocks en raison de la fermeture des frontières, les ménagères ne savent à qui jeter la pierre. Une situation qui remet à la lumière du jour la question de la production locale de riz. « Pourquoi ne pas promouvoir véritablement et valoriser la production de la Semry [société d’expansion et de modernisation de riziculture de Yagoua, Ndlr] par exemple, ou celle de Ndop, plutôt que de dépendre ainsi des importations aux risques de voir les gens mourir de faim ou de provoquer des troubles dans le pays, s’interroge Viviane N.
Salvatrice production locale
Au cours de la concertation avec les acteurs de la grande distribution et de l’import-export, début mars, le Mincommerce soulignait également que selon la douane camerounaise, le pays avait enregistré 41 000 tonnes d’importation de poisson, autre denrée très demandée par les consommateurs camerounais, au même titre que le riz, et dont la majeure partie est importée. A ce niveau par contre, les prévisions du ministre s’avèrent conformes à son appel au calme. Le prix du maquereau doré (au kilogramme) n’a pas beaucoup augmenté. 1350 FCA aujourd’hui, contre 1300 FCFA au premier trimestre. Quand on sait que les importations n’ont pas encore repris, l’on s’interroge sur les raisons de cette stabilité des prix.
Cependant, le gouvernement souligné que la production piscicole locale est constante augmentation. « Cette dernière constitue d’ailleurs une excellente alternative par rapport au poisson importé. Ceci pourrait justifier la relative stabilité observée sur le prix du poisson importé en général », explique le ministre des Pêches et des industries animales (Minepia), Dr Taïga. Entre les silures, le tilapia et les carpes, l’offre se veut de qualité, selon l’interprofession aquacole du Cameroun qui d’ailleurs. La filière espère profiter de la situation actuelle pour augmenter sa production et accroitre sa part de marché.
Déjà, la production du poisson d’eau douce a atteint 10 000 tonnes en 2019. La pêche maritime artisanale, elle, a produit 289764 tonnes en 2019. Des quantités que le gouvernement souhaite voir évoluer, pour satisfaire effectivement le marché local qui demeure sous l’emprise du poisson importé. Cependant, les acteurs de ces filières redoutent une « barrière du prix » qui pourrait démotiver les consommateurs. Les prix du poisson local homologué au kilogramme par le Mincommerce varient entre autres de 2000 FCFA pour le tilapia et de 2500 F pour le silure. Pour le pour la pêche maritime artisanale, « nous sommes passés de 2500 FCFA le kilogramme du bar il y a quelques mois à 4500 FCFA aujourd’hui», déclare une grossiste.
Face au risque de concurrence déloyale dont la pêche locale pourrait souffrir de la part des poissonneries dont le leader du marché est aussi le plus gros importateur de poissons congelés, le Minepia vient ainsi de demander aux municipalités d’aménager des espaces spécifiques pour la commercialisation des produits de la pêche locale.
Changement climatique
Autre denrée, le prix des haricots a relativement grimpé sur les marchés de Yaoundé. Au détail, la boite est passée de 100 FCFA à 250 ou 300 FCFA selon les lieux (Mokolo, Mvog-mbi, Accacia). De plus, pour 1,5 kilogramme de haricots, il faut payer 4000 FCFA. La même mesure valait 2500F, puis 3000F il y a quelques semaines. Or, cette denrée est produite localement dans la région de l’Ouest, un des principaux bassins de production. L’on explique cette situation par l’impact climatique, notamment la forte pluviométrie observée depuis la reprise de la saison des pluies. Quant aux arachides, leur prix a aussi augmenté, malgré l’abondante production de cette année. L’impact sur « l’augmentation du prix est causée par les pertes enregistrées du fait des pluies abondantes de ces dernières semaines, et non pas par rapport à la pandémie du Coronavirus », rassure Edmond O. revendeur au marché Mokolo à Yaoundé. A son comptoir comme ailleurs, on constate une hausse du prix au détail. Pour la variété dite « Garoua », la moins chère sur le marché, le seau de 5 litres vous revient à 3600 FCFA contre 3200 il y a quelques semaines. Et pour le récipient de 2 litres, il faut débourser 1600FCA contre 1200 il y a peu de temps. Les variétés de « l’ouest » ou du « centre » (dont la qualité est différente selon la zone de production ces prix sont encore plus élevés. L’arachide est cultivée dans les cinq (5) zones agro-écologiques du Cameroun. Elle y occupe les premiers rangs dans la hiérarchisation des spéculations par les producteurs. En 2006, elle couvrait une superficie de plus de 236 951 hectares pour une production annuelle de 414 046 tonnes (AGRISTAT, 2006), essentiellement concentrée dans les départements de la Bénoué, du Mayo-Tsanaga et du Mayo-Louti. La production annuelle y est estimée à 400 000 tonnes d’arachides non décortiqués (celle-ci représente la moitié de la production nationale du Cameroun) dont une grande partie est commercialisée sous forme de graines dans les marchés arachidiers de Ngong, Maroua et Figuil, puis transportée vers les grandes métropoles du sud-Cameroun ou exportée vers les pays voisins du Cameroun. L’arachide est consommée soit en graine, soit sous forme d’huile soit sous des formes beurre « , pâte, farine, confiserie.