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Le droit d’assise menace la filière du recyclage du plastique

Roblain Namegni, Directeur général de NAMé Recycling Cameroon, l’un des piliers de l’économie circulaire au Cameroun, dresse l’impact de la loi des finances 2018 sur ce secteur d’activité.

Pour l’exercice 2018, la loi de finances de l’Etat du Cameroun dispose en son article 142-9, portant sur le droit d’accises des emballages non retournables, qu’il est appliqué un droit d’accises spécifique de 5 francs CFA par unité d’emballage non retournable.  Si elle avait été votée par le parlement puis promulguée par le chef de l’Etat, cette loi semble porter de nombreux préjudices aux entreprises de recyclage du plastique exerçant au Cameroun et qui emploient plusieurs centaines de personnes et génèrent des centaines de millions de revenu annuel. Ecomatin a interrogé Roblain Namegni, le Directeur général de NAMé Recycling, une société spécialisée dans le recyclage des déchets plastiques. Ce dernier dresse l’impact de cette disposition législative sur son secteur d’activité et prône un réaménagement en faveur des mesures d’incitation fiscales.

EcoMatin : Comment se porte l’entreprise Namé Recycling en ces temps de crise sanitaire ?

Roblain Namegni :La situation actuelle est pour le moins pleine de challenges à relever. Bien que nous fournissions des services de première nécessité, nous ressentons fortement les effets de cette crise sanitaire qui est en train de muter en crise économique. 

Dans la loi de finances 2018, l’Etat du Cameroun a décidé d’appliquer un droit d’accises spécifique de 5 francs CFA par unité d’emballage non recyclable. Quelle est l’incidence de cette décision sur l’économie circulaire ?

Je pense que les acteurs actif dans l’économie circulaire en général mais dans le recyclage du plastique en particulier se considèrent aujourd’hui et à raison comme victimes collatérales  de cette loi. Je m’explique : collecter, transporter et recycler les déchets plastiques coûte cher ; mais jusqu’à ce jour nous avons réussi à fédérer les différents acteurs de la chaîne de vie des déchets plastiques  (producteurs, consommateurs et recycleurs) autour d’un objectif commun à savoir la réduction des déchets plastiques dans la nature. Cet acquis est en train de disparaître par cette loi, car nous assistons à une désolidarisation des partenaires de premier rang qui étaient bien engagés à nos côtés avant dans cette lutte que nous menons pour la protection de l’environnement, qu’il s’agisse de sensibilisation, de collecte ou de recyclage. Aujourd’hui, après s’être acquitté des droits d’accises, ils n’ont tout simplement plus de budget pour subventionner les entreprises de recyclage comme la nôtre, afin que nous puissions faire notre travail d’intérêt commun. Sans ce support, il est impossible de fonctionner.

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En tant que société de recyclage, cette décision a-t-elle impacté votre chiffre d’affaire et votre capacité de déploiement ? Si oui à combien peut-on chiffrer le manque à gagner ?

Vous n’avez qu’à regarder autour de vous, les déchets plastiques sont toujours présents, la bataille est loin d’être gagnée mais c’est un combat que nous nous devons de remporter. Si la situation reste en l’état, nous devons nous attendre à plus de maladies liées à la prolifération des déchets plastiques due à la disparition d’un secteur prometteur et porteur comme le recyclage des déchets plastiques.  Un secteur qui emploie plusieurs centaines de personnes et génère des centaines de millions de revenu annuel.  Un secteur dont le potentiel se chiffre à des milliards de Fcfa. Le manque à gagner n’est pas seulement économique mais aussi et surtout sociale. Le Cameroun peut à juste titre revendiquer un rôle de leader concernant le recyclage du plastique en Afrique Centrale, nous devons maintenir cette position et en faire un pilier à part entière de notre économie.

Cette disposition de la loi de finances constitue-t-elle un frein  à l’objectif de retrait de 40% des déchets plastiques et de recyclage de 30% assigné au ministre de l’environnement ?

Je ne dirai pas cette loi car j’estime que je n’ai pas les compétences et surtout il ne me revient pas de juger une loi mais je ne peux que constater son effet indirect  sur notre secteur d’activités qui est lui négatif. Comme souligné plus haut le nombre de recycleurs actifs baisse, les fonds disponibles afin d’organiser les campagnes de collecte deviennent inexistants. Notre secteur va mal tout simplement.

Le 07 mai dernier vous avez écrit au Ministre des Finances  pour solliciter son intervention. La réponse vous a-t-elle  été favorable ? Qu’attendez-vous concrètement du gouvernement ?

Nous avons pensé qu’il était important non simplement d’attirer l’attention du gouvernement sur l’effet de cette loi sur notre secteur d’activités mais plus encore de participer de façon constructive à la discussion en formulant des propositions.  Imaginez-vous un moment que l’application de la loi sur les droits d’accises tienne compte des déchets plastiques collectés et effectivement recyclés par les entreprises de recyclage. Imaginez-vous l’impact sur notre environnement, si les entreprises qui doivent payer les droits d’accises peuvent recevoir un rabais sur le montant à payer à hauteur du tonnage qu’elles ont au travers une entreprise de recyclage agréée par les autorités compétentes, retiré de l’environnement.  Nous aurons tout simplement plus d’acteurs sérieux dans le domaine du recyclage et notre secteur pourra réaliser son potentiel.  Il y aura des milliers de nouveaux emplois crées et des revenus fiscaux pour l’Etat dignes d’un secteur d’activités arrivant à maturation.  Nous espérons que l’on tienne compte de nos difficultés. Notre secteur n’est pas demandeur d’autres mesures que de cette incitation fiscale, afin d’encourager les producteurs d’emballages plastiques à travailler plus avec nous.  Un réaménagement de cette loi, dans le sens cité plus haut, nous semble le moyen optimal.

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En cette période de crise de la Covid-19, la gestion des déchets médicaux constitue un véritable challenge pour limiter la propagation du virus Que préconisez-vous pour une gestion optimale de ces déchets médicaux ?

Notre Ministre de tutelle son excellence Monsieur Hele Pierre l’a si bien dit et nous en sommes convainque qu’en cette période de pandémie la meilleure façon de traiter ces déchets dangereux, c’est l’incinération dans le respect des normes environnementales prescrites.

Quelles sont les villes dans lesquelles votre entreprise se déploie aujourd’hui ?

Nous sommes présents à Douala, Yaoundé, Bafoussam, Limbe et aussi à Libreville au Gabon.

Vous venez de remporter le prestigieux prix de l’Energy Globe Award, une référence au niveau international pour le recyclage. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?

Je suis heureux que le travail accompli par nos équipes localement ait une résonnance à l’international. Ce prix est considéré comme une sorte de prix Nobel dans le secteur du recyclage à l’international.   Je suis fière de représenter le Cameroun aussi dignement.

Quels sont les projets à venir pour votre entreprise ?

Pour les raisons mentionnées ci haut nous ne pouvons-nous projeter que sur le court terme car les difficultés actuelles ne nous permettent tout simplement pas de prévoir un moyen ou un long terme. Nous espérons tout simplement que nos difficultés seront prises en compte. 

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