Crise anglophone : pourquoi Me Akere Muna a claqué la porte du Dialogue
Le leader du mouvement NOW explique que les jeux sont pipés d’avance et qu’il ne voulait plus jouer le rôle de spectateur au cours de ces assises.
Il a fallu à peine 24 heures pour que le malaise se fasse ressentir au Palais des Congrès de Yaoundé où se tiennent, depuis lundi 30 septembre, les travaux du Grand Dialogue National. Plusieurs personnalités ont en effet décidé de claquer la porte pour diverses raisons. Parmi elles, celle de Me Akere Muna, leader du mouvement NOW, originaire de la zone anglophone gravement touchée par un choc sécuritaire depuis trois années.
Les raisons pour lesquelles il a décidé de quitter la table des discussions sont nombreuses. « Quand nous nous sommes retrouvés en plénière, je me suis senti spectateur », commence l’ancien Bâtonnier au Barreau du Cameroun. D’après lui, les personnalités ayant pris la parole durant cette séance de travail avaient été choisies d’avance. De même que les commissions et leurs présidents.
Bien plus, il s’offusque du fait que les thématiques avaient été déterminées, mais sans être au préalable distribuées afin que chacun puisse choisir quelle commission intégrer. Encore que les personnes chargées de la gestion de ces commissions sont les mêmes à l’origine des problèmes, souligne l’avocat, condamnant le fait que les dignitaires du pays soient les plus présents dans les dites commissions.
Me Akere Muna dénonce en filigrane un complot qui aurait été ourdi contre les anglophones. « J’ai constaté un phénomène assez rare dans le déroulement des affaires publiques dans notre pays : sur huit commissions, six sont présidées par les anglophones, l’ensemble des travaux sont présidées par un anglophone, le patron du comité technique est un anglophone (…) Si ça se solde par un échec, on dira que c’était géré par les anglophones », soutient le candidat à la présidentielle d’octobre 2018.
« Dans ce contexte-là, je ne pouvais pas cautionner ce qui se passe », Me Akere Muna, qui se dit déçu. Surtout parce qu’après l’annonce du Grand Dialogue National par le président Paul Biya – qu’il avait d’ailleurs saluée – il a remis un document au Premier ministre, Joseph Dion Ngute, dans lequel étaient recensées ses propositions. « Si ça les intéresse, ils n’ont qu’à s’en inspirer », indique-t-il. Me Akere Muna proposait, entre autres, le retour de nouveau au fédéralisme pour ramener la paix et la stabilité, en soulignant qu’il est important d’y aller car le courant fédéraliste est en train de s’effriter à l’avantage du sécessionnisme. « Les sécessionnistes sont déjà à 70%. Après ces travaux, si on n’a pas un document clair sur comment rectifier le tir, le taux d’anglophones favorables à la sécession va augmenter », prévient-il.