Règles prudentielles : l’alerte de la Beac sur les banques
Au plan prudentiel, sur la base des états des 51 banques dans la sous-région ayant déclaré leur situation au 31 mars 2019, il a été relevé que seulement 37 banques sont en conformité et 28 banques disposent de fonds propres nets suffisants pour honorer l'ensemble des normes prudentielles.
C’est un rapport plutôt inquiétant que la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) vient de publier au sujet des banques de la sous-région. Sans les nommer, la banque centrale renseigne qu’au plan prudentiel, sur la base des états des 51 banques ayant déclaré leur situation au 31 mars 2019, il apparaît que, 37 banques sont en conformité avec les dispositions relatives à la représentation du capital minimum (contre 39 banques l’année précédente à la même date). En matière de solvabilité, 42 banques extériorisent un ratio de couverture des risques pondérés par les fonds propres nets supérieur ou égal au minimum de 8 %, contre 45 banques au 31 mars 2018 (le minimum réglementaire était fixé à l’époque à 7 % des fonds propres nets).
Dans le cadre des normes de division des risques, 43 banques parviennent à respecter la limite globale en maintenant en dessous de l’octuple des fonds propres nets, la somme des risques pondérés supérieurs à 15 % desdits fonds propres (contre 45 banques, 12 mois auparavant) et 32 banques se conforment à la limite individuelle en n’entretenant pas de risques pondérés encourus sur un même bénéficiaire excédant 45 % des fonds propres nets (contre 30 banques auparavant).
S’agissant de la couverture des immobilisations par les ressources permanentes, 36 banques réalisent un ratio supérieur ou égal au minimum de 100 % (contre 41 banques, l’année précédente à la même date). En ce qui concerne le rapport de liquidité, les disponibilités à vue ou à moins d’un mois sont supérieures ou égales au minimum réglementaire de 100 % des exigibilités de même terme pour 47 banques (contre 43 banques à fin mars 2018).
Quant au respect du coefficient de transformation à long terme, 36 banques parviennent à financer à hauteur de 50 % au moins (minimum réglementaire) leurs emplois à plus de cinq ans de durée résiduelle par des ressources permanentes (contre 41 banques en conformité l’année précédente à la même date). Enfin, 40 banques maintiennent la somme des engagements sur les actionnaires, administrateurs et dirigeants ainsi que sur le personnel en dessous du plafond réglementaire de 15 % des fonds propres nets (contre 43 banques en conformité un an auparavant).
Au total, 28 banques disposent de fonds propres nets suffisants pour honorer l’ensemble des normes prudentielles assises sur cet agrégat (contre 25 banques l’année précédente à la même date). La norme prudentielle respectée par le plus grand nombre d’établissements est celle se rapportant au ratio de liquidité. La norme relative à la limitation des risques encourus sur un même bénéficiaire constitue celle à l’égard de laquelle on observe le plus grand nombre de banques en infraction.
Les EMF sont en infraction pour ce qui concerne le ratio de couverture des immobilisations, le ratio de couverture des crédits par les ressources disponibles et la norme de liquidité
Règlementations : le cas critique des microfinances
Au 30 septembre 2018, 58% de ces établissements sont en infraction vis-à-vis de la norme de constitution du fonds de solidarité. Les EMF sont en infraction pour ce qui concerne le ratio de couverture des immobilisations, le ratio de couverture des crédits par les ressources disponibles et la norme de liquidité. Le secteur de la microfinance de la Cemac affiche une légère baisse de ses activités, tandis que sa situation prudentielle demeure préoccupante. Au 30 septembre 2018, le secteur de la microfinance de la CEMAC compte 619 établissements de microfinance agréés et en activité, 412 au Cameroun, 11 en Centrafrique, 57 au Congo, 14 au Gabon, 03 en Guinée Equatoriale et 122 au Tchad. À la date sous revue et sur la base des déclarations Sesame effectuées par 481 EMF déclarants, les principaux agrégats de l’activité des EMF de la CEMAC ressortent comme suit : – un total du bilan d’environ 1 103 milliards de FCFA, en baisse de 5% en glissement annuel ; – un encours de crédits bruts à hauteur de 493 milliards de FCFA, constitués principalement des crédits à court terme ; – un montant de dépôts de la clientèle de 774 milliards de FCFA, composés pour l’essentiel de dépôts à vue ; – une qualité du portefeuille de crédit préoccupante, caractérisée par des créances en souffrance déclarées de 90 milliards de FCFA, 18% de l’ensemble des crédits bruts, et un excédent de trésorerie évalué à près de 416 milliards de FCFA ; – un excédent de trésorerie évalué à 416 milliards de FCFA.
Pendant la même période, les données statistiques du secteur de la micro finance sont relativement stables. En effet entre septembre 2017 et septembre 2018, le nombre de clients et de membres des EMF de la CEMAC est passé de 2,7 millions à 2,59 millions, soit une baisse de 9%. Le Cameroun et le Congo détenant le plus grand nombre de clients et de membres, avec respectivement 65% et 18% du total ; le nombre d’agences et de guichets affiche une baisse de 11% sur la période analysée, passant de 1 963 en septembre 2017 à 1 738 en septembre 2018. La baisse de cet indicateur est plus marquée au Congo (-48%) et au Tchad (-13).
Le Cameroun et le Tchad détiennent le plus grand nombre d’agences et guichets avec respectivement 82% et 8% du total de la CEMAC ; – le taux débiteur moyen à l’échelle de la CEMAC passe de 12,1% à 13,3% entre septembre 2017 et septembre 2018, soit une hausse de 1,2 point. Au troisième trimestre 2018, les taux débiteurs les plus importants sont pratiqués principalement au Gabon (18,1%), au Cameroun (14,8%) et au Congo (13,4 %) ; – le taux créditeur moyen dans la CEMAC reste stable sur la période examinée. A fin septembre 2018, les taux créditeurs en vigueur les plus importants sont observés au Gabon (4%), au Cameroun (3,6%) et au Tchad (3,6%).
Conséquences sur les prévisions des crédits
A fin mars 2019, le taux de couverture des crédits par les dépôts « dépôts / crédits à l’économie » dans la Sous-région a gagné 10,6 points par rapport au niveau atteint à fin mars 2018, pour s’établir à 119,7 %.
Cette évolution fait suite à la progression des dépôts bancaires (9,7 %) et à la contraction des crédits à l’économie (0,2 %) sur la période. L’analyse par pays montre que ce ratio a connu, entre mars 2018 et mars 2019, une augmentation dans tous les pays de la zone.
Cette évolution se présente comme suit : Cameroun (de 119,7 % à 124,4 %), République Centrafricaine (de 110,4 % à 112,2 %), Congo (de 100,9 % à 103,5 %), Gabon (de 167,2 % à 178,8 %), Guinée Équatoriale (de 82,0 % à 102,4 %) et Tchad (de 82,4 % à 89,3 %). Il convient de noter que le faible niveau (inférieur à 100 %) de ce ratio au Tchad révèle la fragilité de la liquidité de certaines banques dans ce pays, lesquelles sont contraintes de recourir à des ressources autres que les dépôts bancaires pour financer l’économie.
En résumé, l’évolution de la liquidité bancaire s’explique par la hausse des dépôts bancaires couplée à l’atonie des crédits, en lien avec les décaissements extérieurs obtenus par les pays de la Zone, qui ont permis l’apurement des arriérés commerciaux et pesé sur la dynamique des crédits à l’économie. Il y a lieu cependant de relever que les rapatriements des avoirs extérieurs détenus par les banques commerciales à la suite du renforcement des contrôles de vraisemblance effectués par la Commission bancaire auprès de toutes les banques de la sous-région et le renforcement de l’application de la réglementation des changes, y ont également contribué.
Le coefficient de réserve (réserves / dépôts) du système bancaire a gagné 3,7 points en glissement annuel pour s’établir à 27,8 % à fin mars 2019, contre 24,1 % douze mois plus tôt. Cette amélioration au niveau sous régional découle de l’évolution de ce ratio au Cameroun (de 24,8 % à mars 2018 à 25,5 %), au Congo (de 18,3 % à 26,2 %), au Gabon (de 24,4 % à 31,7 %), en Guinée Équatoriale (de 32,2 % à 36,2 %) et au Tchad (de 18,1 % à 24,1 %). Il s’est par contre amenuisé en République Centrafricaine (de 25,2 % à 23,8 %).
En revanche, le ratio réserves libres / réserves obligatoires est revenu de 328,4 % à 316,6 % entre mars 2018 et mars 2019, soit un repli de 11,9 points, contre un gain de 66,5 points un an plus tôt. La détérioration de cet indicateur sur la période d’analyse résulte de la levée en juillet 2018 de l’exemption à la constitution des réserves obligatoires dont bénéficiaient certaines banques centrafricaines et tchadiennes, d’une part, et l’augmentation des dépôts bancaires (assiette de constitution des réserves obligatoires), d’autre part.